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Analyses - 3 novembre 2006

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novembre 2006

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Vers un bilan «carbone neutre» – Le voyage prend le virage écologique

Devant les préoccupations grandissantes que suscitent les changements climatiques, les gens d’affaires, les vedettes du rock et, de plus en plus, les voyageurs ordinaires cherchent à respecter un bilan «carbone neutre» lorsqu’ils voyagent, en contrebalançant leur contribution aux émissions de gaz à effet de serre (GES). Cette tendance constitue un pas important vers l’amélioration de la performance environnementale du voyage.

Le tourisme contribue aux changements climatiques attribuables à l’activité humaine en entraînant la consommation de ressources naturelles non renouvelables, tant durant les déplacements que pendant le séjour à la destination de voyage. Le transport est responsable d’environ 80% des répercussions totales qu’a un touriste moyen sur l’environnement, le reste étant attribué à la consommation de différents biens et services, comme l’hébergement, la restauration, les loisirs et les activités. Toutefois, le tourisme étant une industrie intersectorielle et non traditionnelle, il n’existe pas de données statistiques globales sur le profil exact de consommation des ressources qui y est associé.

Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat estime que, à l’échelle internationale, le secteur du transport contribue aux émissions de dioxyde de carbone dans une proportion d’environ 13%, le transport aérien de passagers comptant pour 2-3%. La part des émissions provenant du transport terrestre et maritime lié au tourisme n’est, de façon générale, pas connue. On s’attend en outre à ce que le tourisme et le transport de passagers par avion augmentent de 4% et de 5% par année, respectivement, d’ici 2015. La croissance de l’industrie du voyage demeure donc l’un des points chauds du tourisme durable.

Dans l’industrie de l’aviation, on continue d’investir considérabement dans le but de rendre le secteur plus écologique et de réduire sa contribution aux changements climatiques. L’éco-efficacité du reste de l’industrie touristique continue également de s’améliorer, mais les jalons restent à poser dans l’ensemble du secteur. Par exemple, l’efficacité du carburant pour avion s’est améliorée de 5% en 2004 et 2005 seulement et un Airbus A380 ou un Boeing B787 peuvent transporter 100 passagers avec 3 litres de carburant par kilomètre, ce qui est tout à fait comparable au transport automobile, avec la plupart des modèles de voitures. À l’heure actuelle, cependant, le transport aérien sous aucune de ses formes ne peut être considéré comme durable, parce qu’il brûle des combustibles fossiles non renouvelables. En outre, les avions émettent de nombreux gaz nocifs, dont les effets sont 4 fois pires à 30 000 pieds dans les airs qu’au niveau du sol.

Par conséquent, c’est par leurs choix en matière de consommation que les voyageurs pourront devenir plus écologiquement responsables. Malgré une tendance vers un consumérisme plus écologique, des recherches récentes indiquent que la plupart des touristes ne sont pas complètement conscients des conséquences qu’ont leurs choix individuels sur l’environnement ni de leur contribution aux changements climatiques. Malgré l’augmentation des surtaxes imposées sur le transport aérien, le coût réel du voyage n’est pas un reflet fidèle des coûts pour l’environnement.

Options pour atténuer les répercussions du voyage sur l’environnement

Il existe deux options permettant d’améliorer la durabilité écologique du voyage: l’une est de réduire directement les émissions, l’autre, de compenser pour la pollution produite. Parfois, selon l’endroit qu’il visite, le voyageur peut choisir des formes de transport moins polluantes et des produits et services touristiques plus «responsables». Mais, comme voyager moins ne serait pas avantageux sur le plan du développement économique, l’option 2 devient une nécessité.

Le voyage à bilan «carbone* neutre» consiste en l’achat volontaire de crédits de carbone dans le cadre de projets de compensation, qui contrebalancent les émissions polluantes engendrées. Le coût et le choix de ces projets dépendent de la source à laquelle le voyageur achète ces crédits (tableau 1). La plupart des compagnies offrent toute une gamme d’options d’investissement dans la technologie à faible consommation d’énergie ou dans l’achat de certificats d’énergie renouvelable dans les domaines de l’énergie éolienne, solaire, de biomasse et géothermique. La contribution à des projets de stockage du dioxyde de carbone par la plantation d’arbres est une autre option fréquemment offerte.

La compensation volontaire des émissions de gaz à effet de serre est une tendance de plus en plus populaire, étant passée, à l’échelle internationale, de 1 million de tonnes de dioxyde de carbone en 2001 à 9,5 millions de tonnes en 2004. Il n’existe pas, à l’heure actuelle, de statistiques facilement consultables sur la taille du marché de la réduction volontaire des émissions de dioxyde de carbone et encore moins pour le secteur du tourisme. Le protocole de Kyoto souligne des stratégies obligatoires et volontaires de compensation des émissions polluantes. L’industrie du tourisme, y compris le secteur de l’aviation, n’est pas (encore) réglementée et n’est donc actuellement soumise à aucune obligation de se pencher sur la question des changements climatiques. La compagnie British Airways a lancé, en 2005, son propre programme de compensation volontaire et encourage ses clients à contribuer à des projets d’énergie renouvelable. En réalité, le voyage à bilan «carbone neutre» est un moyen de soulager le sentiment de culpabilité que nous ressentons vis-à-vis du voyage et de la consommation. Certaines personnes s’opposent à la compensation des émissions de gaz à effet de serre, parce qu’elles y voient une façon de se donner le droit de polluer.

Tableau 1 : Estimation des émissions et coût des certificats de compensation
correspondants offerts par cinq compagnies pour un voyage aller-retour
en avion entre Montréal et Orlando.

** d’après les calculs des émissions donnés sur les sites Internet des compagnies
respectives pour un voyage de 3500 km. Le coût moyen actuel équivalant à une tonne de C02
sur le marché de la réduction volontaire des émissions est de 1,25$ au tarif d’entreprises.

Certains programmes de compensation sont controversés, la plupart comportant en effet des désavantages inhérents. Par exemple, l’utilisation de biodiésel provenant de produits de l’agriculture comme le sucre ou le maïs soulève des préoccupations en raison du recours au génie génétique. On s’interroge également sur les avantages réels de certains projets menés dans les pays en voie de développement, comme la plantation d’arbres en monoculture avec l’objectif de stocker du carbone. Cette pratique entraîne, entre autres problèmes, une perte de biodiversité et son efficacité est discutable. Dans le district néo-zélandais de Kaikora, le conseil municipal offre aux touristes, au cours de leur séjour, la possibilité de planter un arbre qui porte un numéro et peut ainsi être retrouvé lors de visites ultérieures.

Globalement, le principe de compensation des émissions a été critiqué sur les plans des coûts, des mesures et des certificats et parce qu’il n’incite pas les consommateurs à remplacer les combustibles fossiles qu’ils utilisent par des formes d’énergie renouvelable. La compensation ne permet pas la régulation des activités polluantes, mais doit néanmoins être encouragée comme mesure provisoire. Sans aucun doute, la viabilité et la rentabilité du recours à d’autres formes d’énergie, provenant de sources renouvelables, augmentent en même temps que la technologie progresse.

En attendant de pouvoir faire mieux, les voyageurs peuvent choisir de voyager de façon plus responsable en investissant dans des projets de compensation, et plus particulièrement dans la technologie, qui nous assureront un futur plus vert. D’une façon ou d’une autre, le développement durable implique le principe du «pollueur-payeur» et les voyageurs doivent améliorer leur performance environnementale. Comme on peut le voir au tableau 1, les coûts de ces projets ne sont pas exorbitants. Mais, avant d’en arriver à décider de voyager de façon plus écologiquement responsable, les voyageurs doivent d’abord être informés des répercussions que peut avoir leur contribution à l’effet de serre et des avantages de la compensation des émissions polluantes.

* Par «carbone», on entend le dioxyde de carbone à l’état gazeux. Les projets de compensation des émissions de dioxyde de carbone comprennent parfois la compensation des émissions d’autres gaz à effet de serre.  

Sources:

– Baral, A. et G.S. Guha. «Trees for Carbon Sequestration or Fossil Fuel Substitution: the Issue of Cost Vs Benefit», Biomass and Bioenergy, vol. 27, 2004, p. 41-55. 
– Becken, S. et B. Lane.  «Air Travel and the Environment. An Interview with Hugh Somerville», Journal of Sustainable Tourism, vol. 14, no 2, 2006, p. 216-219.
– Becken, S., D.G. Simmons et C. Frampton. «Energy Use Associated with Different Travel Choices», Tourism Management, vol. 24, 2006. p. 267-277.
– Department for Environment, Food and Rural Affairs. «News Release: Carbon Offset Scheme Launched», 12 septembre 2005, 2 p.
– Gössling, S., M. Bredberg, A. Randow, Sandström et S. Svensson. «Tourist Perceptions of Climate Change: A Study of International Tourist in Zanzibar», Current Issues in Tourism, vol. 9, nos 4-5, 2006, p. 419-435.
– Intergovernmental Panel on Climate Change. «Special Report: Aviation and the Global Atmosphere. Summary for Policy Makers», 1999, 23 p. 
– Lynes, J. K. et D. Dredge. «Going Green: Motivation for Environmental Commitment in the Airline Industry. A Case Study of Scandinavian Airlines», Journal of Sustainable Tourism, vol. 14, no 2, 2006, p. 116-138.
– Van Kooten, G.C., A.J. Eagle, J. Manley et T. Smolak. «How Costly Are Carbon Offsets?
A Meta-analysis of Carbon Forest Sinks», Environmental Science and Policy, vol. 7, 2004, p. 239-251.
– Various authors. «New Internationlist», no 391, juillet 2006

Sur le Web:

– Atmosfair
Climate Care 
Intergovernmental Panel on Climate Change
International Air Transport Association Website
My Climate Via Sustainable Tourism International
Native Energy
– Carbon Neutral Company

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