Le marché brésilien: une puissance montante
Les économies émergentes regorgent d’opportunités d’affaires pour les entrepreneurs de nombreuses industries, dont le tourisme. Pensons aux marchés chinois et indien. La libéralisation de l’économie, l’ouverture sur le monde, l’apparition d’une classe moyenne donnent habituellement naissance à un nouveau marché de voyageurs. Parmi les pays à surveiller: le Brésil. La 10e économie mondiale connaît une forte ascension et les prévisions semblent toutes aussi prometteuses. Une occasion à saisir pour le Canada? Le Québec? Portrait d’un marché émetteur de touristes en pleine expansion.
Connaissez-vous le BRIC?
Le BRIC, concept inventé par l’économiste Jean O’Neill de la banque d’affaires américaine Goldman Sachs,est un acronyme qui identifie le regroupement des pays aux économies émergentes que sont le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine. À l’heure actuelle, ces pays représentent 40% de la population mondiale et 27,3% du produit intérieur brut (PIB) de la planète. En 2010, le BRIC devrait regrouper une classe moyenne de plus de 500 millions d’habitants, soit l’équivalent de la population des 27 pays de l’Union européenne. On prévoit qu’en 2035 la taille des économies du BRIC dépassera celle du G7 (Allemagne, Canada, États-Unis, France, Italie, Japon, Royaume-Uni).
Pour le Canada, sur le plan touristique, le BRIC signifie près de 324 000 touristes, soit 7% de l’ensemble des touristes étrangers (autres que des États-Unis) au pays en 2006. Les graphiques 1 et 2 illustrent la répartition des marchés touristiques du BRIC au Canada et l’évolution de chacun d’entre eux au cours des cinq dernières années. La Chine représente le principal pays émetteur du BRIC, suivi de l’Inde, du Brésil et de la Russie.
Le Réseau de veille s’est déjà penché sur ces pays, sauf le Brésil; en voici un portrait.
Portrait du marché brésilien
Le Brésil compte environ 190 millions d’habitants dont 80% résident en milieu urbain. Le changement de gouvernement en 2003 a insufflé un vent d’optimisme au pays. L’économie s’en ressent ainsi que la propension des Brésiliens à voyager à l’étranger. Le tableau 1 présente un aperçu du marché émetteur brésilien.
Lorsqu’ils voyagent aux États-Unis, les Brésiliens fréquentent les restaurants, font du magasinage, vont dans les parcs d’amusement, visitent les sites historiques et les sites touristiques des milieux urbains. En plus de ses vacances d’été, la clientèle de classe moyenne supérieure effectue généralement un voyage de ski. À cet effet, les destinations préférées sont l’Argentine et le Chili, en juillet et août, et le Colorado en décembre et janvier.L’hôtel de 3 ou 4 étoiles constitue le mode d’hébergement le plus courant. Les solutions moins coûteuses telles que le recours aux parents et amis ou encore le camping s’avèrent aussi intéressantes.
Les voyages d’affaires des Brésiliens comptent pour 36% des départs à l’étranger. Cette proportion est similaire à celle de l’Allemagne, le plus grand marché émetteur du monde. Les voyages d’études sont également très prisés par les Brésiliens. Selon le Department of Commerce des États-Unis, le Canada a remplacé le géant américain comme destination favorite pour les voyages d’études à l’étranger. En 2004, 42 000 étudiants brésiliens se sont procuré des «forfaits études» pour des voyages à l’étranger et, en 2005,on prévoyait une hausse de 40% à ce chapitre. Les étudiants brésiliens: une niche à surveiller!
Opportunités, menaces et défis
En 2006, le Canada accueillait environ 65 000 voyageurs en provenance du Brésil. La plupart d’entre eux (82%) sont arrivés par l’Ontario, 9% par la Colombie-Britannique et seulement 7% par le Québec. Précisons que seule Toronto offre un lien aérien direct avec le Brésil, via Air Canada. Faute d’information récente sur les mouvements interprovinciaux, on présume que le Québec accueille une part beaucoup plus grande de voyageurs brésiliens, mais que leur entrée au pays se fait par l’Ontario. En 2004, Tourisme Québec estimait à environ 15 000 le nombre de visites-province réalisées au Québec par les Brésiliens.
Pour une meilleure performance du Québec sur ce marché, il faut cerner les opportunités. Déjà, on peut en identifier deux: le fait qu’il s’agisse d’un marché d’urbains provenant de milieux extrêmement denses et pollués laisse présager des besoins de grands espaces; et le Brésil comprend un marché de skieurs ouverts aux voyages de ski à l’étranger.
Le Canada comme destination semble plutôt en vogue auprès de la clientèle brésilienne. Dans un sondage en ligne sur les destinations prisées pour un voyage d’agrément alors que l’argent n’est pas un facteur, le Canada arrive parmi les 10 premières. Aussi, les États-Unis considèrent-ils le Canada comme un concurrent majeur sur ce marché.
Malgré ces atouts, les défis et les obstacles sont encore nombreux et certains préalables à l’émergence d’un marché touristique durable sont instables, déficients ou simplement inexistants:
- La desserte aérienne est insuffisante entre le Brésil et le Canada. Cette situation est également vraie pour un grand nombre de destinations étrangères. Les principales compagnies aériennes brésiliennes ont récemment connu d’importantes difficultés financières et remontent tranquillement la pente.
- En moyenne, seulement 2% du revenu des ménages est attribué aux loisirs. En 2005, cela représentait 180$. Les voyages en dehors du pays s’avèrent encore impensables pour la majorité de la population.
- L’équilibre politique et économique du pays demeure fragile.
- Les Brésiliens doivent se munir d’un visa de séjour pour venir au Canada.
- Sur quelque 190 millions d’habitants, seulement 26 millions utilisent Internet (janvier 2007). Et comme la pauvreté est une réalité très répandue au Brésil, les technologies de l’information et les voyages sont hors des préoccupations d’une grande partie de la population.
Selon la Commission canadienne du tourisme (CCT), le Brésil a démontré une bonne performance au cours des dernières années comme marché pour le Canada. Le contexte socioéconomique du Brésil rend possible une croissance significative des visites au Canada. Actuellement en mode d’évaluation de ce marché, la CCT prévoit élaborer une stratégie de pénétration ciblée si les perspectives s’avèrent toujours positives.
Voir aussi:
– Doit-on s’intéresser au marché russe?
– L’Inde, un marché à surveiller
– Quand la Chine s’éveille
Sources:
– Britain International Market Research, International Partnerships and Industry Relations. «Brazil Market & Trade Profile», VisitBritain, janvier 2007.
– Commission canadienne du tourisme. Marketing, Europe, Amérique latine.
– Ministère du Tourisme du Québec, «Le Tourisme au Québec en bref – 2004».
– Mintel. «Brazil Outbound», Travel & Tourism Analyst, no 7, mai 2007.
-Motte, Muriel. «Les ‘BRIC’ tiennent leurs promesses», Le Figaro, 23 octobre 2006.
– Normand, François. «L’autre géant des Amériques», Les Affaires, 22 septembre 2007.
– Normand, François. «Le BRIC bouleverse l’économie mondiale», Les Affaires, 1er septembre 2007.
– Statistique Canada. «Enquête sur les voyages internationaux», 2000 à 2007.
– US Commercial Service. «CS Brazil Market Research: Market Update on Travel & Tourism», décembre 2005.
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