Habitudes des voyageurs vis-à-vis les agences de voyages traditionnelles
Depuis la tempête «Internet» qui a frappé le réseau de distribution au milieu des années 1990, le nombre de points de service d’agences de voyages traditionnelles est passé d’environ 34 000 à quelque 18 000 aux États-Unis en 2008. Voyons où se situe aujourd’hui ce secteur alors que le profil des activités a énormément évolué.
Érosion graduelle des parts de marché
Aux États-Unis, les ventes des agences de voyages traditionnelles affichent une certaine stabilité — on anticipe une faible décroissance d’ici la fin 2009 —, soit un total de 104 milliards de dollars en matière de ventes (graphique 1). Sa part relative par rapport aux ventes globales continue, elle, à diminuer. La part de marché des agences traditionnelles se situait à 41% en 2006 comparativement à 33% en 2009.
S’il est vrai que les parts de marché en ce qui a trait aux volumes de ventes sont moindre qu’auparavant, c’est notamment parce que la plupart des agences mettent beaucoup moins d’efforts dans la vente des billets d’avion. Afin de réduire leurs frais d’exploitation, un nombre grandissant d’agences vont même jusqu’à abandonner leurs accréditations à un GDS. Elles vont alors soit s’affilier à une autre agence partenaire soit simplement effectuer leurs réservations par Internet ou en passant par un grossiste. PhoCusWright estime que 67% des dépenses de voyage effectuées par les agents le seront à l’aide d’un GDS, comparativement à 72% en 2006.
Utilisation des agences de façon plus ciblée
Dans une analyse précédente, nous avons abordé les nouveaux aspects qui caractérisent les changements dans la relation entre les agents et la clientèle (Lire aussi: Comportement de la clientèle: affrontement agences de voyages – métamoteurs (compte rendu de conférence). On l’a vu, cette transformation majeure du positionnement des agences traditionnelles est devenue inévitable pour assurer leur survie au sein d’une nouvelle dynamique de marché.
Il est clair que de moins en moins d’internautes optent pour les agences traditionnelles sur une base régulière. Ils auront davantage tendance à se fier à un agent de voyages pour certains produits particuliers plus complexes (ex.: planifier un safari en Afrique) ou pour une situation donnée (ex.: organiser un mariage à l’étranger). C’est ce qui explique que la proportion des voyageurs branchés qui réservent habituellement par l’entremise d’une agence de voyages est en chute libre depuis l’an 2000 (graphique 2).
Il faut néanmoins retenir que malgré ces statistiques en baisse, cela n’empêche pas plusieurs touristes branchés de demeurer fidèles aux agences traditionnelles, selon le contexte de leur voyage. Environ la moitié des voyageurs branchés réservent leurs prestations de voyages exclusivement sur Internet. Le touriste d’aujourd’hui n’est plus caractérisé par un comportement unique. Les internautes aguerris peuvent être les premiers à savoir que pour certaines catégories de services, ils ont avantage à se tourner vers un agent. D’ailleurs, la firme de recherche PhoCusWright estime que le déplacement des internautes des agences traditionnelles vers les réservations sur Internet a été endigué et qu’on peut même observer un léger renversement de la tendance.
Le marché corporatif
Quant aux agences œuvrant sur le marché corporatif, les changements se sont avérés moins radicaux. L’influence d’Internet s’est fait sentir sur les prix de façon générale, d’autant plus que les grandes agences en ligne comme Expedia se sont montrées très agressives à pénétrer dans ce marché, engendrant une énorme pression sur les agences de voyages corporatives.
Cette situation a entraîné une baisse marquée des tarifs, d’importants investissements en technologie et une consolidation du milieu. À cet égard, deux joueurs dominent la scène américaine: Carlson Wagonlit Travel qui a fait l’acquisition de Navigant en 2006 et American Express qui a acheté Rosenbluth en 2003. Le secteur corporatif a d’ailleurs intégré efficacement les frais de service qui constituent désormais plus de 52% de ses revenus (graphique 3). Quant aux agences présentes sur le marché de l’agrément et des agents indépendants, les commissions demeurent la principale source de revenus.
Performance par secteur
Pour les forfaits et les croisières, il est clair que les agences traditionnelles s’inscrivent encore aujourd’hui comme le principal canal de vente en raison de la nature souvent complexe de ce type de produits (graphique 4). La grande majorité des voyageurs préfèrent toutefois réserver directement auprès du fournisseur ou à l’aide d’une agence en ligne dans le cas de l’hôtellerie et de la location de voitures.
Contrairement aux agences spécialisées sur le marché de l’agrément, les imposantes agences corporatives tirent bien leur épingle du jeu sur les segments hôteliers et aériens alors qu’elles sont responsables de plus des deux tiers des ventes générées par l’ensemble des agences traditionnelles. C’est ce qui explique qu’au global, les agences traditionnelles conservent encore une intéressante part de marché de 55%.
Lorsqu’on analyse le portrait distinctif des agences œuvrant dans le loisir de celles sur le marché corporatif, on constate à quel point il s’agit de deux univers différents (graphique 5). La vente de billets d’avion ne représente plus que 18% des produits vendus par les agences en loisir alors que sur le segment affaires l’aérien compte pour 59% des activités. Les forfaits/FIT et les croisières génèrent désormais plus de 64% des ventes dans l’agrément.
Agents indépendants
La présence d’une proportion significative d’agents de voyages indépendants travaillant à partir de la maison contribue également à transformer le portrait du réseau de distribution. Ils sont maintenant plus de 110 000 agents de voyages en sol américain, soit environ 28% de la communauté. Ils ne représentent toutefois que 9% de la force de vente, soit environ 10 milliards de dollars US.
On observe une tendance à la spécialisation pour le produit des croisières qui compte pour 43% de leur volume d’affaires (graphique 6). La majorité (57%) des agents indépendants travaillent à temps plein et 44% génèrent des revenus dépassant les 250 000 $ US. Ils œuvrent en forte majorité (90%) sur le marché de l’agrément.
La relation des agents avec le Web
Au cours des dernières années, les agents de voyages se sont souvent prononcés contre Internet, qu’ils considèrent comme une concurrence directe. La stratégie consistait à offrir des services différentiés, une expertise et une approche personnalisée. La relation entre Internet et les agents est toutefois en voie de changer alors que le rôle du Web ne se limite plus à favoriser la désintermédiation. Les agences traditionnelles apprivoisent progressivement Internet qui leur procure de nouveaux outils et un tout autre rapport de force pour mieux servir la clientèle. Ces percées technologiques transforment le modèle d’affaires des agences et leur offrent des façons innovantes d’opérer.
L’exemple le plus probant de cette transformation est celui de l’émergence en force des agents indépendants qui ne dépendent plus de terminaux dédiés aux réservations, mais d’un simple branchement Internet. Les transactions effectuées par les agents, directement sur le site Web des fournisseurs, sont de plus en plus fréquentes. Des extranets sont mis en place lorsque l’agent doit être relié à une agence mère. Même les accès Web aux GDS sont maintenant fréquemment utilisés.
Mais si les agences traditionnelles intègrent avantageusement Internet comme outil de travail pour améliorer leur compétitivité et réduire leurs frais d’exploitation, beaucoup restent à faire pour profiter du marché des voyageurs qui souhaitent réserver en ligne. Les quatre grandes agences en ligne (Expedia, Orbitz, Travelocity et Priceline) accaparent 90% des réservations Internet réalisées auprès d’agences de voyages.
Sources:
– Higgins, Michelle. «With Help From the Web, Travel Agents Regain Relevance», New York Times, [http://www.boston.com/travel/articles/2008/08/13/with_help_from_the_web_travel_agents_regain_relevance], 13 août 2008.
– Quinby, Douglas. «When It Comes to Online Travel, Don’t Dismiss Travel Agents», PhoCusWright, juin 2008.
– Quinby, Douglas. «Travel Agency Distribution Landscape: 2006-2009», PhoCusWright, avril 2008.
– Steinbrink, Susan. «Consumer Travel Trends Survey, Tenth Edition», PhoCusWright, mai 2008.
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