Écotourisme urbain: des villes se réapproprient leur héritage naturel
Souvent contesté et encore peu mis en pratique, l’écotourisme urbain offre de nouveaux modes de gestion et de développement de l’activité touristique en ville. C’est une manière de verdir son image en utilisant et en préservant les richesses environnementales et humaines des destinations. Quelques villes explorent déjà cette voie et peuvent en inciter d’autres à créer et améliorer leur offre touristique. L’expansion des villes a chassé la nature, il est peut-être temps de la réintégrer!
Écotourisme urbain: émergence d’une nouvelle offre touristique
L’OMT considère l’écotourisme comme un segment de marché du «tourisme durable» favorisant l’observation, l’appréciation, l’interprétation, l’éducation et l’étude du milieu naturel, de ses paysages, de sa faune, de sa flore et de ses habitants. Or, cette définition limite la portée de l’écotourisme ainsi:
- La superficie des sites non habités est restreinte.
- L’aspect éducatif est limité à une population qui est déjà «convertie» aux principes du développement durable, puisqu’elle entreprend déjà ce genre de voyage.
- D’un point de vue puriste, l’écotourisme doit protéger les espaces naturels. Or, il les rend accessibles et ne garantit en rien l’absence totale d’impacts écologiques ou sociétaux. Sa venue provoque même parfois le développement d’infrastructures d’hébergement et de transport aux alentours de ces zones fragiles.
- La viabilité économique du modèle de gestion peut être menacée, car la croissance est limitée par un volume qui se veut de petite échelle.
Convaincus que ce sont davantage les pratiques plutôt que le milieu visité qui influent le plus sur la «durabilité» des ressources, plusieurs experts proposent une forme plus élargie de l’écotourisme: l’écotourisme urbain.
Selon eux, ce concept présente certains avantages si on le compare à l’écotourisme traditionnel, tels que l’utilisation d’une infrastructure déjà existante, le potentiel d’éduquer et de sensibiliser un plus grand nombre de visiteurs ainsi que les résidants aux pratiques durables. Il offre aussi une structure financière plus viable, vu qu’il dépend moins de la saisonnalité dont souffrent souvent les sites naturels et qu’il permet d’atteindre une plus grande capacité d’accueil.
Exemples de développement de l’écotourisme dans un contexte urbain
Source: penguins.co.nz
Oamaru est une ville située sur la côte est de la Nouvelle-Zélande qui a développé un projet écotouristique urbain basé sur la conservation et l’observation des pingouins «The Oamaru Blue Penguin Colony». La colonie de pingouins a vu le jour lorsque certains de ceux-ci ont utilisé une ancienne carrière comme lieu de nidification. Des volontaires ont alors décidé de nettoyer la zone et de l’ériger comme habitat de reproduction des pingouins. Aujourd’hui, le site est l’attraction touristique la plus importante d’Oamaru et est visitée par plus de 75 000 personnes par an.
Le site offre deux types de visites: un tour de jour pour observer les nids des pingouins et une visite nocturne commentée pour assister à leur retour sur la plage au coucher du soleil. Cette dernière est importante pour la région, car elle génère des nuitées supplémentaires, les visiteurs dormant très souvent en ville après l’activité.
Les pingouins font l’objet d’un suivi quotidien et une deuxième colonie située à proximité, mais non accessible au public, permet de comparer et de mesurer les impacts du tourisme sur le développement de la colonie.
Source: sanctuary.org.nz
En 1995, la «Karori Reservoir Wildlife Reserve» a vu le jour dans une vallée boisée à Karori, à 10 minutes du centre-ville de Wellington, capitale de la Nouvelle-Zélande. La réserve est un sanctuaire pour plusieurs espèces animales rares et menacées d’extinction, dont certaines ont été déménagées et réintroduites sur le site. Le programme de cette restructuration écologique s’étend sur 500 ans et a pour ambition de rendre le site aussi près que possible de ce qu’il était avant l’arrivée des humains.
La réserve est une OBNL gérée par un groupement communautaire et a ouvert ses portes aux visiteurs en 2001. Des tours guidés y sont organisés, incluant des visites nocturnes et à l’aube. Le Visitor Centre renseigne les touristes sur la géologie ainsi que sur l’histoire naturelle et humaine de la réserve. Ces derniers peuvent même participer au projet en devenant membre de la réserve ou en effectuant du bénévolat. La réserve, également désignée Zealandia, est devenue une attraction touristique importante pour Wellington et a inspiré d’autres projets à travers le pays tel que l’écoattraction «Maungatautari Restoration Project».
Des idées urbaines qui flirtent avec l’écotourisme
Certaines destinations ont osé mettre sur pied des projets qui pourraient, dans une certaine mesure, être assimilés à l’écotourisme. La créativité, l’originalité et la vocation de ces initiatives sont très inspirantes.
Source: jardindart.com
À titre d’exemple, dans le but de varier son offre écotouristique et de sensibiliser le public à la conservation de la nature, le Maroc s’est doté d’un Festival de l’art du jardin: le Jardin’Art. Cette manifestation culturelle, scientifique et éducative est dédiée à l’univers du jardin et aux différents métiers du jardinage. L’évènement consacre une large place à l’éducation environnementale et à l’écotourisme, aux activités pédagogiques et ludiques, ainsi qu’à des ateliers artistiques destinés aux enfants. Conférences, tables rondes et projection de films sont au programme pour sensibiliser le public et les visiteurs à la richesse et à la valeur patrimoniale, historique et écologique des espaces verts. L’évènement se décrit comme une œuvre éphémère qui vise un impact durable. L’édition 2009 était une réflexion stratégique sur la thématique «jardins et écotourisme».
Source: inhabitat.com
Cette fois, cap sur la Suisse où un musée des arbres vient d’ouvrir ses portes sur le terrain d’un monastère datant du 14e siècle dans Rapperswil-Jona, la ville des roses sur le lac de Zurich.
Le moins qu’on puisse dire est que la nature y est à l’honneur en pleine ville. Le musée est en fait une exposition en plein air d’environ 2000 arbres disséminés sur deux acres et demie de terrain. L’édifice du musée se veut également vert et a été construit selon des principes écologiques limitant au minimum la production d’effets négatifs sur l’environnement. Plusieurs variétés d’arbres provenant de plusieurs endroits différents s’y dressent fièrement pour le bonheur des visiteurs.
À Montréal, au cœur même du Jardin botanique se trouvent l’Arboretum, qui compte 7000 spécimens d’arbres ainsi que la Maison de l’arbre, qui est un centre d’exposition et d’interprétation ayant pour mission de sensibiliser le public aux rôles prépondérants des arbres et des forêts.
Toujours au Québec, le parc de la Rivière-des-Mille-Îles, à Laval, est un autre exemple d’attraction écotouristique urbaine. Celui-ci abrite un refuge faunique, un centre d’interprétation et mène des actions de protection et de conservation des richesses naturelles du site.
Bien qu’il soit difficile d’associer l’écotourisme aux villes, il n’en demeure pas moins que cette réflexion ouvre de nouveaux horizons. Que savons-nous de nos écosystèmes urbains? Pouvons-nous les valoriser, conserver leurs richesses, les rendre accessibles sans nuire à leur pérennité et informer les visiteurs de leur existence et de leur fonctionnement? Pouvons-nous réintroduire la nature en ville et verdir nos expériences urbaines?
Sources:
- Benchaâb, Abderrazzak. «Écotourisme urbain: les jardins en passe de devenir de nouveaux pôles attractifs pour les touristes ? Le Maroc y croit». Le Journal de l’écotourisme, Le Monde, 11 octobre 2009.
- Higham, James et Lüvk Michael. «Urban ecotourism: A contradiction in terms?», Journal of Ecotourism, 29 mars 2010.
- Justa, Aditi. «Switzerland welcomes world’s first tree museum with open arms», ecofriend.org, 11 Juin 2010.
- N. Okech, Roselyne. «Developing urban ecotourism in Kenyan cities: A sustainable approach.» Journa of ecology and Natural Environment, vol 1, avril 2009.
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Bien qu’il soit difficile de concilier tourisme urbain et croissance verte, il n’en demeure pas moins que, sous l’impulsion de la mouvance du développement durable, les citoyens du monde sont devenus regardants quand à l’intégration des paramètres environnemntaux dans les aménagements existants et particulièrement la verdurisation des immeubles, surtout la cinquième façade, qui a tendance a devenir un jardin potager pour le plaisir et le bien être de tous et surtout pour la biodiversité.
Merci pour cet article.