Réunions et congrès: l’après-récession
La récession économique a marqué l’industrie des réunions et des congrès. Une épreuve incite souvent à remettre en question certaines façons de faire, à éliminer le superflu, à se concentrer sur les priorités. C’est ce qui se produit dans le secteur du tourisme de congrès. Dans le cadre d’un Gueuleton touristique organisé par la Chaire de tourisme Transat de l’ESG-UQÀM, trois personnalités connues œuvrant dans le milieu des congrès sont venues partager leur point de vue sur ces lendemains de crise, ainsi que discuter des perspectives d’avenir de l’industrie. Voici un aperçu de leurs propos.
Rod Cameron, directeur exécutif des Centres de congrès du Canada, ainsi que Roger Tondeur, président de MCI (Genève), présentent les principaux facteurs et enjeux façonnant l’industrie.
Des impacts qui varient
La crise économique n’a pas frappé également toutes les régions du globe; il en est de même pour ses conséquences sur l’industrie des réunions. Les États-Unis, point de départ du marasme, ont probablement été les plus durement touchés. M. Cameron note que:
- les événements associatifs sont plus stables;
- les réunions corporatives s’en ressentent davantage;
- les agendas sont gérés de façon plus serrée, compte tenu de la tendance des clients à s’engager à la dernière minute;
- le nombre de participants et d’exposants, ainsi que les revenus ont baissé;
- l’image de l’industrie en a pris un coup.
Malgré tout, le Canada s’en est bien tiré. Des événements ont été suspendus, remis à plus tard, mais peu ont été annulés. Les réunions, congrès et foires sont toujours vus comme des rencontres stratégiques. Les conférences virtuelles rehaussent bien les réunions, mais ne semblent pas les menacer, puisque le face-à-face demeure essentiel pour favoriser un certain dynamisme. M. Cameron estime aussi que l’industrie des congrès occupe un rôle clé dans la reprise économique et touristique, comme ce fut le cas à la suite des événements du 11 septembre 2001.
Garder de bonnes habitudes
Les périodes de vaches maigres poussent à réviser ses priorités, à mettre les efforts où cela compte vraiment, à ne pas s’engager trop à l’avance et à couper dans tout ce qui n’est pas essentiel. Ces bonnes habitudes risquent de rester et pourraient bien s’inscrire à long terme dans les politiques de planification de réunions d’entreprises ou d’instances gouvernementales. On observe que:
- il y a un grand intérêt pour les outils permettant de mesurer le retour sur l’investissement (ROI);
- les événements doivent offrir une plus-value, une haute teneur en contenu ou de bonnes occasions d’affaires;
- les équipes de planificateurs en entreprise sont réduites; on préfère sous-traiter.
Les attentes des participants sont élevées. Ils veulent:
- s’inscrire au dernier moment;
- participer de plus en plus à la planification du contenu;
- obtenir des crédits de formation;
- profiter des occasions de réseautage;
- vivre de nouvelles expériences.
Un marché d’acheteurs
Au cours des dix dernières années, l’offre de centres de congrès aux États-Unis a augmenté de 42%; une soixantaine de projets majeurs y sont en développement. À cela s’ajoutent les installations des destinations émergentes comme l’Inde, le Moyen-Orient, la Chine et l’Europe de l’Est. Le marché est donc favorable aux acheteurs. Se diversifier, se démarquer, offrir de la valeur ajoutée s’inscrit dans le quotidien des centres de réunions et de congrès.
Une demande grandissante
Le BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine), ces pays aux économies émergentes, regroupe une population croissante de classe moyenne − quelque 500 millions de personnes. Ces travailleurs souhaitent se rencontrer et échanger avec des populations d’autres pays. Des réunions en face-à-face remplissent peu à peu leurs agendas.
Redorer l’image de la réunion et du congrès
Vus par certains comme un gaspillage éhonté en période de compressions budgétaires et de mises à pied massives, les congrès et réunions d’affaires sont victimes de préjugés et doivent justifier leur importance. Les images associées à la fête, aux soirées bien arrosées, au golf ou à tout ce qui n’est pas rattaché aux conférences devraient se faire plus discrètes dans les communications. La récession a d’ailleurs permis d’éliminer les événements symboliques trop peu productifs mais coûteux et instaurés depuis longtemps. Un terme revient: le ROI, le retour sur l’investissement!
Cette industrie doit faire comprendre son rôle dans la reprise économique. Ces rencontres permettent:
- le développement professionnel;
- le transfert des savoirs;
- la recherche et le développement de produits;
- l’avancement des affaires;
- le développement des technologies;
- l’éducation et l’innovation.
Le facteur «vert» est devenu la norme et le format change
Ce n’est plus une option ni de la valeur ajoutée, le client s’attend à des mesures pro-environnement. Pour contrebalancer les impacts du transport, l’événement doit être d’une grande valeur, encore une fois. Les rencontres sont plus informelles, dynamiques, interactives et technologiques. Les conférenciers sont appelés à bouger, à répondre et à questionner, à interagir avec des participants virtuels ou en ligne.
Marc Tremblay, PDG de la Société du Palais des congrès de Montréal, ajoute que la concurrence féroce entre les destinations de congrès les pousse à être proactifs et à agir très rapidement. Il y a 20 ans, une vingtaine de villes se partageaient les événements internationaux. Aujourd’hui, on parle plutôt de 80 villes! Pour maintenir le cap, Montréal a intérêt à connaître le marché, les tendances, les clients, à s’inspirer des meilleures pratiques, comme le Centre des congrès de Singapour. Le Palais des congrès et Tourisme Montréal déploient déjà une stratégie marketing qui consiste à démarcher les organisations rattachées à des pôles d’activité bien précis.
Montréal donne l’image d’une ville agréable où il fait bon vivre, où l’on s’amuse. Pour se positionner avantageusement dans le cadre de conférences internationales, surtout auprès des États-Unis, il peut s’avérer stratégique de véhiculer d’autres facettes de Montréal: son côté «affaires», «recherche scientifique» et «centre de créativité», par exemple. Aussi, l’offre montréalaise est moins onéreuse que bien des destinations concurrentes. Par ailleurs, le Palais connaîtrait actuellement une excellente période pour ses réservations, qui sont en hausse importante.
En conclusion, M. Tremblay propose trois éléments-clés pour une destination de congrès:
- offrir une vision globale (congrès, vol, hôtel);
- agir vite, vite, vite car l’offre est grande;
- garder à l’esprit le concept de l’expérience.
Source: Cameron, Rod, Roger Tondeur et Marc Tremblay. «L’industrie des congrès s’interroge!», Gueuleton touristique, Montréal, 14 octobre 2010.
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