Les visas touristiques, un enjeu d’actualité pour le Canada
Les politiques gouvernementales en matière de visas ont une incidence sur la fréquentation touristique d’un pays. Celle du Canada est-elle efficace? Y-a-t-il place à amélioration lorsqu’on la compare au reste du monde?
Portrait général des politiques de visas
En 2012, seulement 18% de la population mondiale était dispensée de visa pour les voyages à but touristique
L’Organisation mondiale du tourisme (OMT) a publié une étude en janvier 2013 sur l’octroi des visas à travers les pays. En 2012, seulement 18% de la population mondiale était dispensée de visa pour les voyages à but touristique. L’Asie et les Amériques sont les régions les plus «ouvertes» à l’entrée des touristes, alors que l’Europe est la plus «fermée».
En moyenne, plus des deux tiers de la population doit demander un visa pour un voyage à l’étranger avant son arrivée, par rapport à 16% peut en réclamer un à l’arrivée dans le pays, et seulement 2% a le droit de réclamer un visa électronique. Cependant, une nette amélioration est constatée, puisqu’en 2008, l’obligation de détenir un visa touristique avant le départ concernait 77% de la population.
Des procédures simplifiées pour favoriser la fréquentation touristique
Pour les voyageurs, les visas représentent un coût et nécessitent d’eux du temps pour suivre la procédure et répondre aux exigences. Ce qui apparaît comme une simple formalité peut devenir un facteur de dissuasion pour le voyageur qui désire se rendre à une destination.
une amélioration des démarches pourrait générer un surplus de recettes touristiques de 206 milliards de dollars américains
Le secrétaire général de l’OMT, Taleb Rifai, souligne que les procédures d’octroi de visa entravent l’essor du tourisme en matière de fréquentation, de création d’emploi et de croissance économique. Selon une étude réalisée conjointement avec le Conseil mondial du voyage et du tourisme (WTTC) en mai 2012, une amélioration des démarches pourrait générer un surplus de recettes touristiques de 206 milliards de dollars américains et créer 5,1 millions d’emplois supplémentaires d’ici 2015 pour les pays membres du G20.
Le Canada a-t-il une politique restrictive en matière de visa?
Afin de voyager sur le territoire canadien, les citoyens de plus de 70% des pays ont besoin d’un visa, soit davantage que la moyenne mondiale calculée par l’OMT. Ces voyageurs ont le choix entre deux types de visas de résident temporaire: à entrée unique (75$) ou à entrées multiples (150$) valide pour 10 ans.
Parmi les marchés cibles de la Commission canadienne du tourisme, le Brésil, le Mexique, la Chine (sauf Hong Kong) et l’Inde ont l’obligation de détenir un visa touristique. D’après Citoyenneté et Immigration Canada, les délais de traitement varient selon le pays entre 12 et 15 jours (sauf New Delhi: 4 jours).
Selon le Globe and Mail, de nombreux diplomates d’Amérique du Sud et d’Asie se plaignent de la complexité du processus de demande: informations difficiles à rassembler, formulaires régulièrement renvoyés pour cause d’erreurs, et de multiples demandes qui sont finalement refusées.
Le cas du Mexique
Depuis juillet 2009, Ottawa impose un visa temporaire pour les visiteurs mexicains afin de réduire les demandes d’asile, qui étaient souvent injustifiées, selon le gouvernement. Aujourd’hui, ce dernier évalue la possibilité d’annuler cette obligation, mais cela pourrait prendre plusieurs années car tout le système d’immigration est en processus de refonte.
Cette restriction a eu des effets néfastes sur la venue des touristes mexicains (lire aussi: Doit-on continuer de s’intéresser au marché mexicain?).
Grève des centres de traitement des visas du Canada à l’étranger
L’actualité ajoute une note pessimiste, puisque les employés des bureaux de visas à l’extérieur du Canada sont en grève depuis le mois d’avril. Il en résulte d’importants retards dans le traitement et une baisse du nombre de visas délivrés. À la fin juin, l’Association de l’industrie touristique du Canada (AITC) estimait que les délais d’obtention d’un visa pour un Mexicain et un Chinois pouvaient aller jusqu’à 6 semaines, comparativement à 5 à 10 jours en temps normal.
Selon David Goldstein, président de l’AITC, cette situation sera préjudiciable non seulement pour cette saison, puisqu’il estime que la grève coûtera 280 millions de dollars à l’industrie touristique, mais aussi à long terme. En effet, l’obligation de détenir un visa temporaire ne concerne que 20% des touristes internationaux, mais ces derniers proviennent en majorité des pays émergents, qui se classent parmi les marchés émetteurs de touristes ayant les plus fortes croissances.
Recommandations et exemples de bonnes pratiques
Dans leur étude conjointe, l’OMT et le WTTC ont émis des recommandations pour simplifier l’ensemble des procédures d’obtention de visa, tout en donnant des exemples de bonnes pratiques:
1. Améliorer la transmission de l’information: service à la clientèle; communication; partage de l’information entre les gouvernements (et à l’interne); diffusion sur Internet.
2. Faciliter le processus d’obtention d’un visa: réduction des documents demandés et du nombre d’entretiens individuels; augmentation de la capacité de traitement; maîtrise des outils technologiques; délivrance de certains visas à l’arrivée du voyageur; création d’un programme d’exemption des visas.
Bonne pratique: Le gouvernement de Barack Obama souhaite réduire le temps d’attente à 21 jours, comparativement à plusieurs mois actuellement. Un projet pilote est en cours afin que soit mis en place un système de vidéoconférences permettant aux entretiens avec les demandeurs de visa d’être menés à distance. En plus de réduire les frais inhérents aux bureaux situés à l’étranger, cette méthode élargira l’accès aux services à davantage de touristes, qui n’auront pas besoin de se déplacer.
3. Différencier les demandes: retrait de l’obligation d’un visa pour les voyageurs qui en détiennent déjà un, délivré par un autre pays jugé sûr; prolongation de la validité et augmentation du nombre d’entrées autorisées; émission de dispenses de visa pour des zones délimitées (c’est le cas pour les passagers de croisières).
4. Délivrer des visas électroniques.
Bonne pratique: Depuis 2009, dans le cadre du programme américain d’exemption des visas (Visa Waiver Program), les voyageurs des 36 pays participants doivent demander une autorisation de voyage électronique (ESTA) et débourser 14$US, dont 10 vont à Brand USA, l’organisme de gestion de la destination.
5. Établir des accords régionaux permettant à des personnes de voyager dans les pays membres avec un seul visa.
Bonne pratique: La Commission européenne souhaite améliorer et moderniser sa politique des visas pour les courts séjours dans l’espace Schengen (où aucun contrôle de papiers d’identité n’est effectué aux frontières internes). Pour cela, elle a ouvert une consultation publique en ligne, entre mars et juin dernier, afin de recueillir l’avis de la population.
De nombreux pays souhaitent alléger leurs procédures de visas pour les voyageurs afin de donner un coup de fouet à leur industrie touristique. Et vous, la politique de visa de votre pays a-t-elle une influence sur vos activités professionnelles?
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Source(s)
– Association de l’industrie touristique du Canada, communiqué de presse. «Is Canada Open for Business?», 9 juillet 2013.
– Association canadienne des organismes artistiques. «La grève des agents du service extérieur pourrait perturber la saison des festivals», capacoa.ca, 27 juin 2013.
– Bellavance, Joël-Denis. «Visas imposés aux Mexicains: des économies... et une baisse du tourisme», lapresse.ca, 16 février 2013.
– Clark, Campbell. «How Canada’s complex visa application deters would-be travellers», theglobeandmail.com, 11 juillet 2013.
– Eturbo News. «U.S. Tests Remote Video Visa Interviews for Tourists and Business Travelers», skift.com, 30 juillet 2013.
– Keung, Nicholas. «Canada’s tourism industry could take hit during strike by visa staff», thestar.com, 21 juin 2013.
– Marin, Stéphanie. «Abolition des visas pour les Mexicains: cela pourrait prendre quelques années», quebec.huffingtonpost.ca, 25 juillet 2013.
– Organisation mondiale du tourisme, communiqué de presse. «Visas: l’Asie-Pacifique et les Amériques sont les régions les plus « ouvertes » pour les voyageurs», media.unwto.org, 28 janvier 2013.
– Organisation mondiale du tourisme. «Visa facilitation: Stimulating economic growth and development through tourism», janvier 2013.
– Organisation mondiale du tourisme et Conseil mondial du voyage et du tourisme. «The Impact of Visa Facilitation on Job Creation in the G20 Economies», juin 2012.
– White, Martha C. «Obama’s visa reforms could be a boon for American hotels», nbcnews.com, 20 janvier 2012.
Sites Web:
Citoyenneté et Immigration Canada
Les agents canadiens des bureaux de visas à l’étranger ont mis un terme à la grève fin septembre: http://www.pafso.com/news_releases_fr.php?newsID=168