Verdir un festival par la sensibilisation
Selon un sondage de la Buckinghamshire New University, 80% des festivaliers affirment qu’ils se sentent responsables de la diminution de l’impact environnemental d’un événement. Rassemblant plusieurs milliers de personnes, les festivals constituent des lieux propices pour l’engagement de la clientèle sur les enjeux écologiques et climatiques. Prenez-vous au sérieux vos pratiques écologiques? Savez-vous les mettre en valeur?
La perception de la clientèle
Un sondage à l’intention des festivaliers est depuis 2008 produit par Teresa Moore, de la Buckinghamshire New University, en partenariat avec l’organisme A Greener Festival. Ce questionnaire en ligne vise à connaître la perception de la clientèle quant à l’impact des festivals sur l’environnement. En 2012, l’échantillon était composé de 2 300 répondants en provenance de 32 pays – y compris du Canada –, le Royaume-Uni (40%) et la Slovaquie (27%) étant les mieux représentés. Les deux tiers des participants étaient âgés de 30 ans et moins.
L’opinion des festivaliers en matière d’environnement est résumée ci-dessous. Les résultats des années 2012 et 2008 sont quelquefois comparés afin de montrer l’évolution des réponses.
- 90% des répondants pensent que les festivals ont la responsabilité de minimiser leur empreinte écologique;
- 80% estiment que la tâche revient également aux festivaliers (comparativement à 56% en 2008);
- 43% affirment qu’ils ont changé leur comportement après avoir découvert de nouvelles initiatives ou idées proposées lors d’un événement;
- Les éléments suivants sont perçus comme des conséquences néfastes de la tenue de festivals: déchets (87%), trafic (81%), bruit (77%), dommage au sol (66%) et émission de CO2 (56%);
- 86% des répondants trient leurs matières résiduelles lorsque les installations le permettent (comparativement à 62% en 2008);
- 28% considèrent les pratiques écologiques de l’événement avant d’y assister;
- 87% iraient voir la prestation de leur groupe favori même si l’événement n’avait pas de politique verte.
Pour la plupart des festivaliers, les pratiques écologiques ne font pas partie des priorités dans le choix d’un événement. Toutefois, la clientèle est consciente que cette responsabilité lui incombe autant qu’aux promoteurs. L’équipe de direction d’un festival devrait considérer un certain nombre de facteurs avant d’entreprendre le virage vert.
Quels sont les ingrédients pour réussir sa stratégie environnementale?
Il est important de comprendre les responsabilités qui accompagnent la stratégie environnementale.
Les experts mentionnent plusieurs enjeux dans l’implantation d’une stratégie environnementale en tourisme: manque de fonds, de réglementation et d’information; intérêts multiples des parties prenantes; contexte politique; soutien de l’administration et capacité de l’organisation. En 2009, le festival Pride Toronto, l’une des plus grandes célébrations culturelles de la communauté gaie et lesbienne (LGBT), a entamé un processus d’analyse dans le but de devenir «carbone neutre» pour 2013.
L’organisation a ainsi formé un partenariat sur trois ans avec l’Icarus Foundation, organisme spécialisé en recherche et éducation environnementale et climatique en tourisme. Plus spécifiquement, elle souhaitait mesurer son impact, sensibiliser et éduquer les employés, les bénévoles ainsi que le public, et mettre en place les mesures adéquates. Un coordonnateur a été embauché au cours de cette période.
La stratégie environnementale (objectifs, mesures et indicateurs de performance) a été élaborée lors de la première année. Dès la deuxième, le festival a mis sur pied bon nombre d’initiatives telles que l’installation d’un kiosque d’information avec écran tactile destiné, entre autres, à évaluer l’intérêt du public sur le sujet et à l’informer sur les initiatives entreprises dans l’organisation. Malgré tout, le festival n’a pas réussi à atteindre l’ensemble des objectifs. Pourquoi?
Premièrement, l’implantation d’une série considérable d’actions (liées à la gestion des matières résiduelles, à l’énergie, à l’eau, aux fournisseurs, aux émissions de gaz à effet de serre, etc.) doit être en harmonie avec les valeurs organisationnelles. Plusieurs pressions externes (politiques et financières, par exemple) peuvent venir bouleverser les priorités des organisateurs. Pride Toronto est très impliqué socialement, et l’énergie du coordonnateur a été canalisée à cette fin. Il est conseillé aux organismes d’insérer leurs pratiques de durabilité dans leurs principes directeurs.
Deuxièmement, ce type de projet devrait être mené par un décideur à l’intérieur de l’organisation. L’engagement et la motivation des employés ainsi que de l’administration sont privilégiés pour l’opérationnalisation d’un plan d’action. Finalement, la communication de ses bonnes pratiques concrétise la vision d’un festival et le travail accompli.
Des initiatives de sensibilisation dans les festivals
35% du dioxyde de carbone (CO2) émis par l’industrie touristique dans l’atmosphère provient des déplacements terrestres.
Les festivals constituent un carrefour artistique et culturel d’excellence pour la sensibilisation d’une clientèle captive. L’organisation du carnaval de Rio de Janeiro a incité de façon originale les esprits festifs à échanger leurs canettes de bière vides contre un billet de métro gratuit dans le «tourniquet à bière». La fréquentation de ces derniers a été supérieure de 86% à celle des tourniquets classiques au cours d’une journée. En matière de bienfaits sociaux, les infractions liées à la conduite en état d’ébriété ont diminué de 43% ce jour-là (voir la vidéo).
Source: YouTube. The Beer Turnstile Antarctica AlmapBBDO
Des festivals à thématique écologique misent sur leur expertise pour éduquer la clientèle. À Vancouver, l’Epic Festival, prônant un mode de vie durable, offre des ateliers de jardinage pour les espaces restreints, tels que les balcons d’appartement.
Au Québec, plusieurs événements font appel à la brigade Écho’Scouade pour conscientiser les festivaliers et les commerçants aux comportements écoresponsables. L’organisation des Jeux du Canada 2013 (Sherbrooke) a mis sur pied l’équipe verte Cascades pour informer les participants et le public sur les mesures prises en matière de développement durable. Grâce à la collaboration du Conseil régional de l’environnement de l’Estrie, cette équipe deviendra permanente et sera valorisée dans diverses manifestations.
Depuis 2010, la norme BNQ 9700-253 sur la gestion responsable d’événements aide les organisateurs à minimiser leur impact environnemental et à augmenter les retombées économiques et sociales. Cette certification propose des critères d’intégration progressive du développement durable. L’adhésion des parties prenantes (fournisseurs, employés, clients, commanditaires, etc.) à votre vision et la communication de vos actions facilitent le changement dans l’organisation. De plus, l’engagement de l’ensemble de vos relations et des festivaliers dans le processus pourrait produire des effets positifs insoupçonnés!
Analyse réalisée grâce à un partenariat avec Tourisme Montréal sur le tourisme urbain durable.
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Source(s)
- Cabrini, Luigi. «Tourism in the Era of Global Climate Change», Tourism and the Implications of Climate Change: Issues and Actions, Bridging Tourism Theory and Practice, vol. 3, Emerald Books, 3 décembre 2010, p.55.
- Challis, Ben. «What Fans Want – Green Events – And Their Fave Band!», A Greener Festival, 11 janvier 2013.
- Dodds, Rachel et Sonya Graci. «Greening of the Pride Toronto Festival: Lessons Learned», Tourism Culture & Communication, vol. 12, no 1, 2012, p. 29-38.
- Epic Festival. «Gardening Workshops», consulté le 27 septembre 2013.
- International Centre for Crowd Management and Security Studies. «New Survey Highlights Fans Concerns About the Environmental Impact of Live Events», iccmss.co.uk, janvier 2013.
- Jeux du Canada 2013. «L’équipe verte Cascades», consulté le 27 septembre 2013.
- Moore, Teresa. «What the Audience Thinks about the Environmental Impact of Live Events - 2012 Survey Results», Bucks New University/A Greener Festival, présentation effectuée lors de la conférence Green Events and Innovations, à Londres, en 2013.
- Stewart, Lea. «Carnival-Goers in Brazil Exchange Empty Beer Cans for a Free Train Ride Home», inhabitat.com, 14 juin 2013.
Il ne faut pas se le cacher… ceux qui viennent pour un festival ont dans l’esprit pour la grande majorité de faire la fête. L’environnement c’est bien, la fête c’est mieux. Dire que la protection de l’environnement c’est important est une chose, le protéger en est une autre. Mais avec la bonne organisation d’un festival je pense qu’on peut arriver à joindre fête et respect de l’environnement. Bien organiser, bien gérer, faire comprendre, diriger les festivaliers, communiquer et tout devrait aller.