La réelle volonté de voyager de façon responsable
Y a-t-il un besoin de durabilité en tourisme?
Il va sans dire que l’industrie du voyage et du tourisme doit être plus durable. Entre 2012 et 2030, le nombre des touristes internationaux devrait connaître une augmentation moyenne de 43 millions par année, pour atteindre 1,8 milliard (Organisation mondiale du tourisme, 2014). Cette croissance comporte son lot de répercussions néfastes. En effet, si l’on se penche seulement sur le secteur des croisières, on constate de multiples impacts négatifs. Selon la Lighthouse Foundation (2014), un navire de croisière dans les Caraïbes produit environ 50 tonnes de déchets solides, 800 000 litres d’eaux usées et 130 000 litres d’eaux grises en une semaine.
La demande en matière de durabilité
De nombreuses études effectuées au cours des dernières années par de multiples fournisseurs de voyages ont montré que les voyageurs sont prêts à dépenser plus pour du tourisme durable. Un rapport établi en 2012 par The Travel Foundation et Forum for the Future a permis de constater que 75 % des clients désiraient des vacances responsables. Une autre étude de 2012, menée par TripAdvisor, affirmait que 71 % des sondés feraient des choix écologiques au cours de cette même année. En 2011, une analyse de CondeNast Traveler a conclu que 58 % des choix d’hôtel des voyageurs étaient influencés par le soutien qu’offre l’hôtel à la communauté locale. Selon une étude faite par Kuoni, toujours en 2011, 22 % des répondants plaçaient la durabilité parmi les trois facteurs principaux ayant une incidence sur leur choix de vacances (www.sustainabletourism.net). Bien que les consommateurs disent vouloir davantage d’options de durabilité, choisissent-ils réellement ces options et qui sont ces consommateurs?
Le comportement véritable des voyageurs
Afin de déterminer si les touristes avaient bel et bien payé pour du tourisme durable, l’Université Ryerson (Kwan, Liu et Mak, 2014) a entrepris un sondage pour connaître leurs dépenses. Les résultats de cette enquête ont montré que 73 % d’entre eux comprenaient le sens du tourisme durable et pouvaient nommer des pratiques qui, à leur avis, étaient durables (faire un don à des organismes voués à l’écologie, séjourner dans un hôtel vert, etc.). Un peu plus du tiers (35%) des voyageurs avaient opté pour un hôtel vert au cours des 12 mois précédents; cependant, plus de la moitié des répondants demeuraient incertains, ce qui illustre bien le fait que la marque verte ou durable constitue un élément important dans la prise de décision des consommateurs.
Parmi les touristes aux comportements durables, 39 % achetaient souvent ou toujours des aliments locaux en voyage. Un pourcentage beaucoup moins élevé (10 %) des voyageurs avait acheté des crédits de carbone et 2 % d’entre eux avaient fait un don à un projet de durabilité pendant leurs vacances.
Dans leur ensemble, les résultats de l’enquête ont permis de conclure que 37 % des voyageurs avaient dépensé plus d’argent pour obtenir des options liées au tourisme durable. Quant à savoir combien, seulement 6 % de ces gens disaient avoir payé 10 % ou plus du montant habituel.
Du point de vue démographique, ce sont les répondants les moins âgés qui se sentaient davantage préoccupés. Les 18-24 (22 %) ans et les 25-34 (26 %) ans étaient prêts à payer plus que leurs aînés. En outre, les femmes se souciaient plus de l’environnement que les hommes.
Conclusion
L’étude révèle clairement que le comportement des voyageurs est en train de changer, mais que ce n’est pas chose courante. Elle dit également que le coût des options de tourisme durable ne doit pas dépasser celui des autres alternatives, étant donné le nombre restreint de consommateurs prêts à payer des sommes importantes.
Par ailleurs, malgré le fait qu’ils connaissent l’appellation et le sens du terme tourisme durable, les consommateurs ne savent pas nécessairement repérer les options ou les produits écologiques au moment de leur achat. Les gens sont conscients de la durabilité, mais ils préfèrent les options les plus simples et les plus abordables. Pour inciter les consommateurs à choisir davantage les offres écologiques, l’industrie doit leur présenter ces caractéristiques de façon plus claire.
Enfin, si l’industrie souhaite vraiment protéger ses atouts touristiques, les options de durabilité offertes aux touristes devront devenir la norme plutôt que l’exception.
Collaboration
Rachel Dodds
Professeure, Ted Rogers School of Hospitality & Tourism Management, Ryerson University
Rachel Dodds est reconnue à travers le monde en tant qu’experte du tourisme durable. Elle est professeure à la Ted Rogers School of Hospitality and Tourism Management à l’Université de Ryerson [...]Lire pluset directrice de la firme de consultants Sustaining Tourism. Elle est l’auteure des livres “Power and Politics” et “Sustainable Tourism in Islands”. Ses champs d’expertise se concentrent sur le tourisme durable, les changements climatiques et la responsabilité sociale des entreprises. Elle est titulaire d’un Ph.D. de l’Université de Surrey en Angleterre et d’une Maîtrise en gestion du tourisme de l’université de Griffith en Australie. Elle est membre fondatrice de la Canada’s Icarus Foundation, participe au Sustainability Council for the Tourism Industry Association et est ex-membre de la Travel and Tourism Research Association of Canada. Elle a vécu et travaillé sur quatre continents et a voyagé dans plus de 75 pays.
Site de l’institution : http://www.ryerson.ca/htmresearch/research_faculty/rachel_dodds.html
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Source(s)
- Kwan, H.; Liu,H.; & Mak, H. (2014) Willingness to pay for sustainable tourism. Ryerson University, Toronto.
- Lighthouse Foundation. (2014). Sustainable Tourism and Cruises.
- Sustainabletourism.net (2014)
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