Faire place aux travailleurs expérimentés
Attirer les travailleurs expérimentés c’est bien. Les conserver, en créant un climat de travail respectueux et harmonieux, c’est mieux !
Depuis près de 20 ans, les travailleurs expérimentés constituent un segment croissant de la population active au Canada. Pour plusieurs entreprises touristiques, l’embauche de personnes retraitées s’avère une solution intéressante pour pallier la pénurie de main-d’œuvre. Reconnus pour leur assiduité, leur souci de la qualité, leur loyauté et leur disponibilité, ces candidats sont de plus en plus courtisés, et ce, dans tous les secteurs d’activité. Pourtant, peu d’entreprises ont mis en place des initiatives pour les attirer et les fidéliser.
Comprendre leurs besoins et s’y adapter
Afin de séduire ce segment de travailleurs, les entreprises touristiques doivent bien comprendre leurs attentes. Premièrement, les personnes expérimentées pourraient ressentir le besoin d’être sécurisées quant à leur lieu de travail. Avec la pandémie de COVID-19, elles pourraient se questionner sur les mesures sanitaires mises en place. Deuxièmement, il ne s’agit pas d’un groupe homogène : certains de ces employés sont très scolarisés, d’autres non ; les uns travaillent pour le plaisir, les autres le font pour pallier une retraite précaire. Voici tout de même quelques tendances de fond et pistes d’adaptation. Ces travailleurs veulent :
- être stimulés intellectuellement et développer leurs compétences. Contrairement aux préjugés persistants, ils aiment les défis et recherchent la formation. Plusieurs études ont conclu qu’ils ont la même capacité d’apprentissage que les plus jeunes, ils apprennent toutefois différemment.
- trouver un équilibre entre le plaisir et le travail. Autrement dit, de la flexibilité. Plusieurs aménagements d’horaires sont possibles, comme la semaine de travail réduite ou le temps partiel volontaire — deux formules tout à fait compatibles avec le concept de retraite progressive. Le temps partagé représente une avenue intéressante pour les postes de cadres. Si la gestion d’un plus grand nombre d’employés est davantage fastidieuse, elle permet aussi une meilleure adaptation aux périodes de forte affluence. Les horaires flexibles et le télétravail sont d’autres solutions qui offrent plus de latitude.
- faire une différence pour les autres. Le travail n’est pas seulement un gagne-pain, il est aussi profondément lié à l’identité et au statut. Les travailleurs expérimentés aiment réaliser des tâches où leurs compétences sont mises en valeur, et ils apprécient les marques de reconnaissance. Impliquez-les dans des projets spéciaux, des comités ad hoc ou des mandats de formation. Les recherches le martèlent : il faut les employer à titre de mentors afin de favoriser le transfert des connaissances.
- gagner de l’argent. Les attentes en matière de rémunération ne sont pas généralisables : les motivations, l’ancienneté et la situation financière diffèrent d’une personne à l’autre et demandent ainsi d’y réfléchir au cas par cas. Différents incitatifs fiscaux sont disponibles, comme le crédit d’impôt pour la prolongation de carrière. Celui-ci vise à éliminer l’impôt à payer sur une partie du revenu de travail des employés expérimentés afin de les inciter à demeurer ou à retourner sur le marché du travail.
Bonnes pratiques pour recruter et fidéliser ces travailleurs
Le gouvernement du Québec a conçu un guide de bonnes pratiques afin d’accompagner les organisations dans l’inclusion de ce bassin de main-d’œuvre à leurs effectifs. Parmi celles à privilégier se trouvent les actions suivantes :
- Adapter le processus de recrutement : indiquez explicitement dans vos affichages de postes que les travailleurs expérimentés sont les bienvenus. Lorsque vous utilisez des images, assurez-vous de représenter la diversité ;
- Favoriser l’équilibre entre la vie personnelle et la vie professionnelle : offrez des horaires de travail flexibles et davantage de congés pour des raisons personnelles ;
- Valoriser le développement des compétences : proposez des occasions de formation ou de stage et ciblez les compétences à développer avec les travailleurs expérimentés concernés ;
- Reconnaître et faire valoir leur contribution : donnez de la rétroaction constructive sur le travail accompli, favorisez le dialogue et fixez des objectifs réalisables ;
- Offrir la possibilité de changer de rôle et de tâches : proposez des défis variés qui tiennent compte des compétences et des capacités physiques de ce groupe d’employés ;
- Aménager les milieux de travail selon leurs besoins : offrez un lieu ergonomique dans lequel ils pourront s’épanouir au fil du temps ;
- Créer un climat d’intégration et de cohabitation intergénérationnelles optimales : misez sur la coopération entre les travailleurs de différentes générations, implantez une culture favorable aux interactions entre chacun.
Les forces et défis d’une équipe intergénérationnelle
Les équipes de travail diversifiées ont tendance à être plus performantes et créatives, car elles profitent d’une grande richesse sur le plan des compétences. On note toutefois que la cohésion y est plus longue à atteindre : les valeurs peuvent être très différentes. Les équipes intergénérationnelles sont portées à vivre plus de conflits lors de leur formation, mais lorsque ces différends sont résolus adéquatement, ils poussent l’organisation à être beaucoup plus efficace.
Plusieurs milieux de travail n’ont toujours pas réussi à créer cette culture d’ouverture. Paradoxalement, on retrouve encore chez certains grands employeurs ce que l’on appelle de l’âgisme, c’est-à-dire de la discrimination par l’âge fondée sur des stéréotypes et des préjugés.
Finalement, afin d’éviter les tensions intergénérationnelles, les organisations doivent faire preuve d’équité. D’ailleurs, les travailleurs expérimentés sont les premiers à vouloir être traités comme leurs collègues. Les aménagements d’horaires, les programmes de formation et les marques de reconnaissance sont des pratiques profitables pour toutes les générations. Bref, les adaptations que vous réaliserez pour accueillir les travailleurs âgés vous permettront de fidéliser l’ensemble de vos employés.
Source de l’image à la une : Cyril Doisneau 2021, collaboration spéciale pour la Chaire de tourisme Transat
Note : Cette analyse est la mise à jour de l’article : Attirer et fidéliser les travailleurs expérimentés : il est temps de passer à l’action
Collaboration
Stéphanie Fissette
Enseignante et Conseillère en ressources humaines, spécialisée dans le domaine touristique
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Source(s)
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- Champagne, Véronique. « Du tourisme pendant la retraite… en tant qu’employé ! » emplois.ca, 9 avril 2019.
- Conseil québécois des ressources humaines en tourisme (CQRHT). « L’intégration des personnes de 50 ans et plus dans l’industrie touristique — Rapport final et plan d’action », cqrht.qc.ca, janvier 2010.
- CQRHT. « Diagnostic sectoriel de la main-d’œuvre en tourisme », cqrht.qc.ca, édition 2010.
- CQRHT. «Vers une stratégie d’emploi des personnes de 50 ans et plus dans l’industrie touristique », cqrht.qc.ca, avril 2008.
- CQRHT. «Offrir des emplois en tourisme aux retraités : un modèle gagnant-gagnant », cqrht.qc.ca, consulté en ligne le 3 avril 2013.
- Gouvernement du Québec. « Le Québec valorise l’apport de ses travailleurs expérimentés. Résumé du Guide de bonnes pratiques pour favoriser l’embauche, le maintien et le retour en emploi des travailleurs expérimentés », 2018.
- Ministres fédéral/provincial/territoriaux responsables des aînés. « Travailleurs âgés : Étude et élimination des préjugés », mai 2021.
- Pépin, Richard. « Gestion des équipes de travail. Aidez vos équipes à exceller », Trois-Rivières, Les Éditions SMG, 2005, 334 p.
- Saba, Tania. « Les différences intergénérationnelles au travail : faire la part des choses », Gestion, vol. 34, no 3, automne 2009, p.25-37.
- Saba, Tania. « Promouvoir une stratégie viable en faveur d’un vieillissement actif », Vie et vieillissement, vol. 8, no 2, 2010, p.31-38.
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