Huit facteurs de succès d’un projet de dynamisation
Un centre-ville de rêve ? Pourquoi pas ! Et si un projet de dynamisation urbaine émerveillait toute la communauté ?
Il n’y a pas de recette miracle pour redonner du souffle à un centre-ville qui manque d’énergie, mais il y a certainement des composantes favorables. À l’occasion de la 37e édition du colloque Rues principales qui se déroulait à Montréal en avril dernier, Flora Charlet, directrice du réseau Rues principales et Olivier Legault, urbaniste et directeur du Service-conseil ont présenté les facteurs incontournables pour réussir un projet de dynamisation de centre-ville. Voici un aperçu de leur présentation, illustré de quelques exemples inspirants.
1. La volonté politique
De la volonté, du courage et du leadership politique constituent la base de réussite d’un projet. Cela se traduit par un conseil municipal qui reconnait l’importance de conserver des usages structurants au centre-ville est qui est prêt à attribuer des fonds conséquents. Même si celui-ci représente l’âme de la communauté, son histoire, sa vitrine culturelle, le lieu de rassemblement que l’on dévoile fièrement aux visiteurs, cela ne suffit pas toujours pour convaincre les élus les plus résistants. Des arguments fiscaux sont aussi nécessaires. Développer le centre-ville devrait favoriser des finances saines. Et selon Olivier Legault, la démonstration est simple à faire.
En effet, M. Legault explique que les commerces de grande surface qui s’implantent en périphérie de la ville coûtent plus qu’ils ne rapportent étant donné les investissements qu’ils nécessitent en infrastructures supplémentaires (route, aqueduc, égouts, etc.). Leur valeur foncière au pied carré ne justifie pas l’ampleur de l’investissement. En revanche, les commerces indépendants du centre-ville engendrent, quant à eux, des revenus pour la municipalité puisque les infrastructures sont déjà en place et la valeur foncière y est plus élevée étant donné l’attrait du lieu.
Source : Unsplash
2. Une vision partagée
Un exercice de réflexion s’impose. Il doit porter non seulement sur l’identité du centre-ville, sur ses forces et ses faiblesses, sur ses défis et ses opportunités, mais aussi sur le partage des éléments de vision véhiculée par les différentes parties prenantes de la collectivité (institutions d’éducation, milieu corporatif, entreprises touristiques, organismes culturels, investisseurs immobiliers, résidants, etc.). Par la suite, l’exercice consiste à formuler un énoncé de vision commune, rassembleuse, qui permettra de stimuler les idées et de faire rêver, mais aussi de guider et de recadrer certains projets lorsqu’ils déclenchent une polémique.
3. La mobilisation et l’adhésion du milieu
D’abord, le climat de confiance et de transparence au sein du conseil de Ville en regard du projet de dynamisation favorise la mobilisation et l’adhésion du milieu. Mais une stratégie de communication et d’animation est souhaitable pour créer un mouvement d’affection de la communauté pour sa ville. Cette affection concerne aussi le milieu des affaires. L’une des façons de la propager consiste à mettre en place un réseau d’ambassadeurs chargés de mobiliser le secteur.
À Val d’Or, le mouvement Les avenues de la 3, en référence à la 3e avenue, l’artère principale de la ville, a été créé dans cette optique. Ce projet, mis sur pied par Geneviève Béland, coordonnatrice au développement culturel à la Ville de Val d’Or, devait apaiser les tensions en regard de certains aspects du centre-ville, notamment des travaux de revitalisation qui se sont échelonnés sur plus d’une année.
Pour atténuer les critiques qui semblaient occuper davantage l’espace que les voix favorables, ce projet d’animation comportait aussi la création d’un réseau d’ambassadeurs composé de commerçants, de citoyens et d’employeurs situés dans les rues avoisinantes prêts à aider et à informer les visiteurs du centre-ville. Les avenues de la 3, c’est aussi la création de parcours d’ambiance, la confection de murales et de spectacles déambulatoires qui ont tous contribué à réconcilier et même à réjouir la communauté face à son centre-ville.
Source : Geneviève Lagrois/Attractivité Abitibi-Témiscamingue
4. La structuration organisationnelle du milieu
Le modèle de gouvernance du projet doit être efficace. Le comité de projet inclut une ressource pivot, soit « M. ou Mme centre-ville », qui assure le lien avec les collaborateurs et la communauté. Les mécanismes de décision et d’opérationnalisation gagnent à être clairs : qui décide et qui met en œuvre ?
5. Un plan d’action opérationnel et chiffré
Le plan d’action doit mettre l’emphase sur les chantiers prioritaires en fonction des ressources disponibles. Il inclut le modèle d’affaires préconisé et la stratégie de financement. À cet égard, Mme Flora Charlet, directrice du réseau Rues principales, estime qu’une ressource dédiée à la recherche de financement est indispensable.
6. L’évaluation du projet en continu
Le projet doit comprendre des indicateurs de performance qui viendront documenter les retombées des investissements. Il peut s’agir, par exemple, du taux d’occupation des commerces dans un périmètre donné ou encore de l’achalandage à une période X. Pour la durée du projet dans le temps, il faut aussi prévoir des évaluations et de l’amélioration continue.
La Ville de Gaspé a dû ainsi revoir le projet de capitale des pêches à Rivière-au-Renard, compte tenu des effets des changements climatiques. Initiés à la suite d’inondations destructives en 2007, les plans de revitalisation consistent à réaménager les terrains donnant sur le fleuve avec l’objectif de raconter l’histoire de la pêche ainsi que de mettre en valeur la pêche moderne. Plusieurs équipements récréotouristiques sont prévus, tels qu’une tour d’observation et une piste cyclable. Mais les grandes marées de décembre 2022 ont causé des dommages à la plage et remis en question certaines composantes du projet en cours. La municipalité, à l’aide d’experts, a adapté son plan en tenant compte de la répétition probable de ces événements climatiques extrêmes. D’autres études permettant de mieux prévoir l’érosion des berges sont également prévues.
Avec ce projet, Gaspé a remporté le prix Aménagement de l’espace public du réseau Rues principales. La mise en valeur de l’identité locale et la résilience face aux changements climatiques ont, entre autres, été saluées. L’inauguration est prévue pour le printemps 2024.
7. La connaissance des champs d’action
La connaissance des règles en matière de développement commercial et résidentiel confère une longueur d’avance au comité du projet. Celui-ci, riche de son savoir, pourra élaborer des idées innovantes en concordance avec les lois et les règlements, mais aussi en tirant profit des possibilités qui sont en son pouvoir.
La Ville de Saint-Hyacinthe, avec son Programme d’aide à l’implantation de commerces au centre-ville, visait à augmenter la superficie occupée par le commerce de détail et les bureaux de professionnels au cœur du centre-ville. Le programme, qui s’est déployé de 2020 à 2023, s’adressait à tout locataire ou propriétaire commercial occupant souhaitant installer ou agrandir un commerce ou un bureau dans un quadrilatère précis.
La subvention représentait l’équivalent de 100 % du loyer pour la première année d’occupation, jusqu’à concurrence de 30 000 $. Le montant était versé en parts égales sur trois ans. La Ville a ainsi réussi à réduire le taux d’inoccupation du centre-ville de 18 % à 9 % en trois ans. Ce type de programme a généré beaucoup de nouveautés. En tout, quelque 51 commerces ont profité de la subvention. En offrant des avantages à un type de commerces en particulier, les autorités ont pu exercer un contrôle sur le développement et sur le dynamisme de son centre-ville.
Source : Tourisme Saint-Hyacinthe
8. Un projet en continu
Un projet de dynamisation est laborieux et nécessite l’implication d’intervenants provenant de différents milieux et aux objectifs variés. Il s’agit d’un travail de longue haleine qui exige une bonne structure. L’énergie et la confiance sont de mise pour l’amorcer. La persévérance portera ses fruits.
Le succès d’un projet de revitalisation rejaillira sur l’ensemble de la communauté, qu’il s’agisse des entreprises directement touchées, de la population, des investisseurs et des intervenants de l’industrie touristique. Un centre-ville dynamique et animé attire citoyens et visiteurs.
Image à la une : Unsplash
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Source(s)
- Chambre de commerce de la Côte-de-Gaspé. « Capitale des pêches – Suivi de la planification stratégique – Corporation de développement de Rivière-au-Renard », 2 octobre 2023.
- Charlet, Flora et Olivier Legault. « Dans les coulisses de la réussite : 8 facteurs incontournables », conférence donnée lors du 37e colloque Rues principales, Montréal, 10 avril 2024.
- Guennoum, Zineb. « Centre-ville de Saint-Hyacinthe : Des résultats concluants pour le Programme d’aide à l’implantation de commerces », Le Courrier, 25 janvier 2024.
- Izaguirré-Falardeau, Gabrielle. « Les avenues de la 3 : réinventer le centre-ville de Val-d’Or », Attractivité Abitibi-Témiscamingue, consulté le 21 mai 2024.
- Morin, Marguerite. « La capitale des pêches maritimes prend vie à Rivière-au-Renard », Radio-Canada, 7 juillet 2023.
- Morin, Michel. « Un prix pour Rivière-au-Renard, Capitale des pêches », radio chnc.com, 15 avril 20224.
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