Le géant se réveille
Avec la création d’une première stratégie nationale officielle pilotée par Brand USA, nos voisins du Sud témoignent d’une volonté accrue de repositionner leur pays au premier rang des destinations touristiques mondiales.
«America is open for business!» déclarait le président Obama lors d’un discours donné à Disneyworld en 2011. Il annonçait ainsi la mobilisation de plusieurs agences fédérales visant à stimuler le tourisme tant international que domestique aux États-Unis. Depuis, plusieurs initiatives ont été déployées, notamment en ce qui concerne l’obtention des visas pour les voyageurs étrangers.
Une invitation au rêve américain
Avant 2010, la responsabilité de la promotion nationale du tourisme était décentralisée au niveau des États. Constatant le besoin d’une stratégie globale, le gouvernement a fondé la Corporation for Travel Promotion, maintenant connue sous le nom de Brand USA, pour faire rayonner sa marque.
En mai 2012, Brand USA a lancé sa première campagne nationale invitant les visiteurs à «découvrir cette terre de rêves», misant fortement sur une présence en ligne et une stratégie de réseaux sociaux (voir la vidéo ci-dessous). Le site DiscoverAmerica.com ainsi que ses pages Facebook et Twitter se déclinent en plusieurs versions, en fonction des pays émetteurs ciblés. La première phase de l’initiative de marketing intégré, au coût de 12,3 millions de dollars américains pour les trois premiers mois, mise d’abord sur les marchés japonais, canadien et britannique. Le Brésil et la Corée du Sud seront ensuite courtisés, suivis d’autres pays comme la Chine, l’Inde, l’Allemagne, le Mexique et l’Australie.
Source: Youtube.com
La décennie perdue
Depuis l’imposition de mesures de sécurité plus sévères à la suite des événements du 11 septembre 2001, les États-Unis ont connu un certain recul dans le classement des destinations touristiques mondiales. Une vive concurrence internationale et l’évolution des tendances touristiques ont également contribué à la baisse de la performance américaine (lire aussi: Classement mondial des destinations et des marchés émetteurs). Alors qu’en 2000, le pays recevait 17% des dépenses touristiques internationales, cette part est tombée à 11% en 2010. L’industrie américaine du tourisme a surnommé cette décennie The Lost Decade, illustrant ainsi la perte d’occasions d’affaires, qui aurait coûté au pays 509 milliards de dollars américains en retombées dérivées du tourisme, dont 214 milliards en dépenses directes par les voyageurs.
En 2011, les États-Unis ont repris leur élan et connu une année record, avec un total de 62 millions de visiteurs internationaux. Les efforts déployés par Brand USA et les mesures adoptées pour accélérer le processus de traitement des demandes de visas ont permis au pays de connaître une hausse importante de visiteurs, particulièrement en provenance du Brésil, de l’Australie, de la Russie, de la Chine et de la Corée du Sud (voir le graphique 1).
Les retombées touristiques de cette année s’annoncent encore meilleures qu’en 2011. Au cours des neuf premiers mois de 2012, les dépenses des visiteurs étrangers ont atteint 123 milliards de dollars, une hausse de 8% par rapport à la même période l’an dernier.
Plus de BRIC, plus de fric
Selon les projections de l’U.S. Department of Commerce, les voyageurs en provenance de la Chine, du Brésil et de la Russie devraient respectivement croître de 274%, 135% et 131% entre 2011 et 2016 (lire aussi: Le point sur les marchés émergents). Les États-Unis apporteront des modifications substantielles à leurs modalités d’accueil et réduiront les barrières au développement touristique pour profiter pleinement de l’essor de ces marchés émergents. Un programme pilote actuellement à l’étude propose que la Chine et le Brésil soient ajoutés à la liste de ceux qui sont exemptés de visas pour des séjours touristiques.
Avec la Corée du Sud, ce duo de nations émergentes affichait en 2011 les taux de croissance les plus importants parmi les arrivées internationales aux États-Unis, une tendance qui prendra sûrement plus d’ampleur si la levée de visas se concrétise. Malgré des délais d’attente liés au processus qui pouvaient dépasser 100 jours, plus d’un million de Brésiliens et 802 000 Chinois ont visité nos voisins du Sud en 2010. Le temps d’attente pour un visa est maintenant réduit à 5 jours pour la Chine, alors qu’au Brésil, il faut dorénavant compter de 2 à 15 jours.
«En 2012, votez pour… le tourisme!»
L’industrie touristique américaine se concerte et mobilise ses citoyens, les invitant à se rallier à la cause du voyage (voir la vidéo ci-dessous). La campagne Vote Travel fait un usage astucieux d’un autobus similaire à ceux utilisés par les candidats en période électorale. Une équipe de l’U.S. Travel Association réalise une tournée de lobbying à travers le pays, afin de sensibiliser le public aux avantages économiques de l’industrie et d’informer les législateurs à propos d’actions favorables à son expansion.
Source: Youtube.com
Le tourisme est devenu une priorité nationale en raison de son rôle de moteur économique et des créations d’emplois qui en découlent aux États-Unis. Y a-t-il lieu pour le Québec de s’inquiéter de la concurrence accrue que cela sous-entend? Alors que la performance du marché d’agrément américain au Québec est source d’inquiétude (lire aussi: Retour à la baisse des Américains au Québec en 2011), de plus en plus de Canadiens traversent la frontière pour profiter de vols moins chers ou pour faire une escapade de magasinage (lire aussi: La concurrence des aéroports frontaliers américains et Les tarifs aériens sont-ils trop coûteux?). Le Québec devrait-il jouer la carte de la «coopétition» en créant des partenariats avec ses voisins afin de proposer, par exemple, des circuits combinés?
Sources:
− Lenhart, Maria et Nick Verrastro. «Jubilant Industry Leaders Hail Obama’s Travel Strategy», travelmarketreport.com, 23 janvier 2012.
− Martin, Hugo. «Spending by international visitors sets new record for September», latimes.com, 3 décembre 2012.
− U.S Travel Association et Oxford Economics. «The Lost Decade: The High Costs of America’s Failure to Compete for International Travel», février 2010.
− U.S. Travel Association. «Ready for Takeoff: A plan to Create 1.3 Million U.S. Jobs by Welcoming Millions of International Travelers», 2011.
− Task Force on Travel & Competitiveness. «National Travel & Tourism Strategy», 2012.
Sites Web:
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