Le voyage solo en vogue
Comme on le sait, les gens se marient de moins en moins et, lorsqu’ils font le grand saut, la tendance est aux unions tardives. Par ailleurs, on assiste à une augmentation du nombre de divorces et du nombre de personnes vivant seules, souvent veuves. De tels changements dans le paysage démographique modifient la donne quant à la demande touristique. La proportion des personnes voyageant seules ne cesse de croître, comme en témoignent les résultats d’études récentes.
Les voyages comme remède à la solitude
Selon une enquête réalisée en 2005 par l’éditeur des publications touristiques Fodor, le segment des voyageurs solos devient de plus en plus important. Environ 40% des adultes américains ont effectué un voyage d’agrément de deux nuits et plus en solitaire au cours des trois dernières années. En 2001, le US Travel Data Center évaluait ce marché à 16 millions de personnes, soit 22% des voyageurs américains.
La majorité des gens interrogés perçoivent des avantages à voyager seuls, surtout en termes de flexibilité et de liberté. De plus, 71% estiment qu’il s’agit d’une façon agréable de faire de nouvelles rencontres. Néanmoins, 44% des Américains entretiennent un préjugé défavorable envers les voyageurs solos, particulièrement à l’endroit des femmes (55%).
Même son de cloche du côté du marché britannique, alors que les célibataires – toujours en nombre croissant – représentent désormais une cible importante pour les professionnels du tourisme. Certains voyagistes britanniques comme Solo Holidays, Friendship Travel ou Saga ciblent spécifiquement ce créneau. Solo Holidays par exemple, qui vend des vacances à environ 20 000 personnes seules par année, a constaté une importante progression de la demande pour ce type de voyages depuis trois ans. Saga, pour sa part, propose plus particulièrement des séjours sans suppléments individuels pour les personnes âgées de 50 ans et plus.
Le nombre de foyers composés d’une seule personne est en forte augmentation en Grande-Bretagne. Ils étaient estimés à 6,3 millions en 2001, soit environ 30% des foyers britanniques, et ils devraient atteindre les 8,5 millions d’ici 2021.
Scénario similaire au Québec
Les Québécois voyageant en solitaire génèrent plus de 31% des visites-personnes du tourisme d’agrément au Québec. Précisons toutefois que, selon la définition de Statistique Canada, une personne voyage seule lorsque les autres membres qui font partie du même ménage ne l’accompagnent pas. C’est donc dire qu’un individu prenant part à un voyage de groupe organisé est comptabilisé comme un voyageur solo.
Le phénomène des voyages solos n’est guère étonnant si l’on considère que, d’après le dernier recensement de Statistique Canada réalisé en 2001, environ 53% des Québécois sont célibataires, séparés, divorcés ou veufs. Et la situation ira en s’amplifiant alors que le Québec verra la composition moyenne de ses ménages passer de 2,43 personnes en 2001 à 2,10 personnes en 2035 (graphique 1).
Par ailleurs, une analyse de la composition des ménages québécois qui voyagent au Québec indique qu’elle s’apparente sensiblement à celle de la population. En effet, près de la moitié des voyages d’agrément d’une nuit et plus sont effectués par des personnes célibataires, veuves, séparées ou divorcées (graphique 2).
Que recherchent-ils?
Les célibataires ont tendance à adopter une vie sociale plus active que les autres. Ce sont souvent des personnes indépendantes, aux revenus relativement importants et prêtes à dépenser beaucoup pour se faire plaisir. En général, les destinations urbaines et les séjours actifs obtiennent la cote des voyageurs solos grâce à la variété de l’animation et aux rencontres potentielles qu’ils offrent. Ce segment de clientèle s’intéresse également aux croisières, aux spas et aux produits liés à la remise en forme et aux soins de beauté.
Doit-on s’adapter?
Fait intéressant, plusieurs hôteliers ont remarqué que les voyageurs solos constituent une clientèle qui dépense beaucoup lors de ses séjours. L’offre touristique n’est cependant pas toujours adaptée à leurs attentes. Par exemple, ces derniers doivent habituellement défrayer un important supplément pour des forfaits avec occupation simple des chambres. Plusieurs grossistes n’affichent qu’une grille tarifaire applicable à une occupation double. D’autres indiquent clairement les suppléments pour les occupations simples.
Ces pratiques traditionnelles s’avèrent très impopulaires auprès des voyageurs solos. Elles sont aujourd’hui remises en question en raison de l’évolution de la demande. Selon certains experts, les professionnels du voyage devront adapter leur offre. Des grossistes européens tels Thomson Holidays et Thomas Cook ont déjà adopté des initiatives pour courtiser le créneau du voyageur solo. En effet, pendant une période d’essai, ils ont aboli les suppléments individuels sur certaines destinations. Comme les résultats se sont avérés positifs, on peut s’attendre à ce que d’autres intervenants emboîtent le pas. Un service de jumelage pour certains types de prestations (ex.: croisières) représente une alternative intéressante.
Dans la plupart des hôtels, le prix d’une chambre non incluse dans un forfait demeure souvent le même, que la chambre soit occupée par une ou deux personnes. Certains établissements exigent un léger supplément pour la deuxième personne.
Les intervenants désireux de cibler cette clientèle doivent prendre en considération que la perspective de manger seul en voyage représente l’aspect le plus difficile à envisager. Pourquoi alors ne pas proposer aux voyageurs des formules comprenant une certaine forme d’animation durant les repas pour pallier cet irritant? Dans les restaurants, l’installation, face à la cuisine, de bars à dîners constitue aussi une approche intéressante, moins intimidante (photo).
L’important consiste à transmettre l’idée que les gens seuls auront, s’ils le désirent, l’occasion de se divertir. Comme le fait de voyager seul peut également entraîner des préoccupations relatives à la sécurité, des messages rassurants de la part des destinations pourraient s’avérer appropriés. Pour plusieurs personnes seules, le voyage en groupe demeure la meilleure option.
Le marché évolue constamment et l’industrie touristique doit demeurer attentive aux besoins de la clientèle de plus en plus exigente et adapter ses produits en conséquence. Elle devra notamment tenir compte des changements démographiques qui s’observent dans la plupart des pays industrialisés et qui se traduisent par un plus grand nombre de personnes vivant seules. Inévitablement, cette tendance se reflète dans les habitudes des voyageurs, puisqu’un nombre croissant d’entre eux se déplace seul.
Sources:
– Bauer, Ana. «L’individualisation des sensibilités et des comportements: impacts touristiques», Direction du Tourisme de France, mars 2005.
– D’Orgeval, Alice. «Les solos dans la cible des TO», L’Écho Touristique, 9 janvier 2004.
– Hatcher, Thurston. «Solo Travelers Relish Going it Alone», CNN [http://www.cnn.com/], 30 avril 2001.
– HotelMarketing.com. «Study: Traveling Solo Is a Popular Trend», 4 mars 2005.
– Maison de la France. «Les célibataires: une niche de marché à exploiter», Infos Veille UK, 16 mai 2005.
– Institut de la statistique du Québec. «Statistique Canada, Recensement de 2001», [http://www.stat.gouv.qc.ca/], 20 janvier 2003.
Statistique Canada. «Enquête sur les voyages des Canadiens», 2003.
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Bonjour,
Je suis tombée sur ce site lorsque j’étais à la recherche d’info sur quelque chose qui ne semble pas exister (encore!). Je voyage seule et j’aime ça (mon mari préfère rester à la maison). J’ai fait Compostelle 2 fois, je suis allée aux Olympiques de vancouver en tant que bénévole et je viens de faire du vélo (en solo) de Toronto à Mtl (une semaine).
Maintenant je n’ai pas les moyens de voyager à mon goût (lire: assez) alors je cherche des idées. J’aimerais trouver une dame qui voudrait voyager mais pas seule (parcequ’elle est plus âgée ou craintive ou n’a pas envie d’organiser le voyage)… mais le hic c’est qu’elle serait prete à couvrir mes frais (je ne suis pas exigeante!). Evidemment ceci n’est pas pour tout le monde mais je m’imagine une femme de 75 ans (j’ai 60), autonome, à l’aise financièrement et qui aurait envie d’aller passer 1-2-3-4-5 semaines en France ou Espagne ou faire une croisière… Naturellement il faudrait ‘connecter’ d’avance et voir si nous sommes compatible car j’agirais en quleque sorte en dame de compagnie… mais pour le voyage.
En tous les cas, je vous fais ce commentaire car je pense que mon idée est unique mais qu’il mérite de faire partie des réflexions de personnes comme vous qui examinent les tendances dans le domaine du tourisme. Je ne cherche pas une réponse à ce courriel…je voulais juste partager cette reflexion.