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Analyse - 8 octobre 2015

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octobre 2015

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Hôtellerie et économie collaborative : quelle concurrence?

L’émergence d’Airbnb a des effets négatifs sur certains marchés hôteliers, statistiques à l’appui. Néanmoins, certains experts assurent que la location de logements entre particuliers constitue une offre complémentaire à l’hôtellerie traditionnelle.

La location de logements entre particuliers est encadrée légalement dans plusieurs villes à travers le monde. Cet automne, les instances politiques du Québec se penchent sur la question pour réglementer cette pratique, qui est loin de faiblir. Mais que savons-nous de l’incidence de ces nouveaux entrants sur l’hôtellerie? Certaines études démontrent que cette concurrence nuit aux hôteliers, alors que d’autres statistiques se veulent rassurantes.

 

Airbnb et les autres plateformes similaires se développent rapidement

En 2014, la valeur des ventes en hôtellerie a crû de 5 %, comparativement à 11 % pour la location de logements entre particuliers

La location de logements entre particuliers existe depuis longtemps, mais l’essor de ce marché est sans précédent avec l’émergence d’entreprises telles qu’Airbnb. Selon Euromonitor, depuis la crise économique survenue en 2008, ce secteur a connu des taux de croissance beaucoup plus élevés que l’hôtellerie (sauf en 2009, année où les deux marchés ont enregistré un ralentissement). En effet, en 2014, la valeur des ventes de cette dernière a crû de 5 %, comparativement à 11 % d’augmentation pour la location de logements entre particuliers. On peut l’expliquer en partie par les plateformes dites collaboratives, qui ajoutent de plus en plus de destinations à leur offre. À titre d’exemple, Airbnb prévoit enregistrer un chiffre d’affaires de 900 millions de dollars américains en 2015, et le nombre de clients et d’offres disponibles sur son site a presque triplé entre 2013 et 2014.

L’hôtellerie moyenne gamme, grande perdante?

Euromonitor a analysé les données du nombre d’établissements hôteliers entre 2008 et 2014. Les hôtels de moyenne gamme (2 et 3 étoiles) sont les seuls dont la part a baissé, passant de 63 % à 56 %. Au contraire, la part des hôtels économiques a augmenté de 18 % à 26 %, et celles des hôtels 4 et 5 étoiles se sont maintenues au même niveau.

Selon Euromonitor, les hôtels économiques ont accru la qualité de leurs services et de leurs installations afin de séduire la clientèle optant pour la location de logements privés. Quant à l’hôtellerie 4 et 5 étoiles, elle continue d’attirer le segment de voyageurs prêts à payer davantage pour recevoir un service haut de gamme. Entre les deux, les établissements de moyenne gamme éprouvent de la difficulté à se forger une identité et à offrir un niveau de services qui séduise les voyageurs.

Qui fait de l’ombre à qui?

Voici quelques statistiques permettant de dresser le portrait de l’environnement concurrentiel entre les groupes hôteliers et les deux principaux loueurs de logements entre particuliers :

  • En 2014, HomeAway et Airbnb cumulaient des valeurs de ventes respectives de 4,8 milliards et 3,7 milliards de dollars américains, comparativement à 27,5 milliards pour le plus important groupe hôtelier, Marriott International.
  • La valeur boursière d’Airbnb est évaluée à 25,2 milliards de dollars américains. Elle surpasse ainsi celles de Marriott (20,6 milliards $US) et de Starwood (14,1 milliards $US), et se rapproche de celle de Hilton (27,4 milliards $US).
  • HomeAway et Airbnb comptent des taux de croissance annuels cumulés bien plus élevés que les groupes hôteliers. Ces derniers se sont maintenus aux alentours de 10 % entre 2009 et 2014, alors que HomeAway a enregistré un taux de 29 % et Airbnb de 251 %.
  • En 2014, les réservations effectuées sur le site d’Airbnb représentaient 7 milliards de dollars américains, soit seulement 1 % du marché total du secteur de l’hébergement.

Un effet négatif pour certains marchés hôteliers

Des chercheurs de l’Université de Boston ont mesuré l’incidence économique d’Airbnb sur l’hôtellerie traditionnelle. En utilisant les statistiques présentées par Airbnb et les données de près de 3000 hôtels du Texas à partir de 2003, ils ont pu observer qu’une augmentation de 10 % de l’offre d’Airbnb correspondait à une baisse de revenu pour les chambres d’hôtel de 0,37 %. À Austin, où le nombre de locations offertes est le plus important, l’effet sur le chiffre d’affaires des hôtels est d’environ 8 à 10 %. Enfin, les hôtels économiques et de moyenne gamme subissent davantage la concurrence d’Airbnb que ceux du segment haut de gamme.

D’autre part, à San Francisco, les taux d’occupation des hôtels connaissent une plus faible croissance les samedis et dimanches pour certains segments de prix. Selon le consultant Rick Swig de RSBA & Associates, la seule explication pertinente réside dans la concurrence livrée par l’offre de location de logements entre particuliers, ces derniers ciblant l’hébergement de la clientèle d’agrément qui voyage les fins de semaine et durant les périodes de vacances.

Des spécialistes se font rassurants

D’après le consultant Sean Hennessey de Lodging Advisors, près du quart de la clientèle d’Airbnb à New York ne semble pas fréquenter l’hôtellerie traditionnelle. En effet, 19 % de sa clientèle loue un logement durant 30 jours ou plus, ce qui est peu répandu en hôtellerie. De plus, un autre 4 % des clients est constitué de groupes de 5 voyageurs ou plus. Ceux-ci auraient moins tendance à séjourner à l’hôtel, la limite étant souvent quatre personnes dans une chambre.

les taux d’occupation à New York n’ont pas été affectés par l’ajout de l’offre de location de logements de particuliers

De plus, Sean Hennessey constate que les taux d’occupation à New York n’ont pas été affectés par l’ajout de l’offre de location de logements de particuliers. Cela étant dit, il est possible que cette observation ne s’applique qu’à cette métropole, où l’offre hôtelière ne comble pas la demande. D’autre part, la firme Smith Travel Research a comptabilisé l’inventaire de chambres des hôtels des cinq quartiers de New York et les logements loués sur Airbnb. Elle constate que les offres d’Airbnb ne représentent que 7,5 %, mais la part est de 38 % à Brooklyn, ce qui peut s’expliquer par la faible quantité d’hôtels dans ce quartier.

Airbnb montre patte blanche

Selon l’étude d’Airbnb, menée entre avril 2013 et mars 2014 sur le marché montréalais, la plateforme collaborative était complémentaire à l’industrie touristique déjà existante. À Montréal, 85 % des résidences d’Airbnb étaient situées à l’extérieur des quartiers hôteliers traditionnels.

Chip Conley, d’Airbnb, assure que les hôteliers ne doivent pas s’inquiéter de l’émergence d’Airbnb, en partie car leur principal marché est celui des séjours à long terme. Cependant, Euromonitor prévoit la croissance de ces plateformes collaboratives sur les segments de luxe et d’affaires. De quoi durcir la compétitivité sur les marchés déjà éprouvés, et peut-être l’amorcer sur d’autres…

 

Une seconde analyse détaillera les récentes initiatives de groupes hôteliers qui ont décidé d’intégrer l’économie collaborative dans leurs stratégies de développement.

 

Image à la une : © istockphoto

Source(s)

— Airbnb. « Nouvelle étude : La communauté Airbnb a contribué 54,6 M$ à l’économie montréalaise », fr.airbnb.ca, 13 novembre 2014.

— Euromonitor. « Global hotels: Catering to a new traveller », euromonitor.com, août 2015.

— Freitag, Jan D. et Jessica Haywood. « Digging to the core of Airbnb’s Big Apple data », hotelnewsnow.com, 4 août 2015.

— Genois Gagnon, Jean-Michel. « Airbnb en voie d’être légalisé au Québec », lapresse.ca, 9 août 2015.

— Griswold, Alison. « Airbnb is thriving. Hotels are thriving », slate.com, 6 juillet 2015.

— Hotel News Now. « The impact of the sharing economy on hotels », hotelnewsnow.com, consulté le 27 août 2015.

— O’Neill, Sean. « Airbnb’s threat to hotels may be structural, going beyond tax fight », tnooz.com, 27 août 2015.

— Zervas, Georgios, Davide Proserpio et John Byers. « The rise of the sharing economy: Estimating the impact of Airbnb on the hotel industry », Boston University School of Management Research, 7 mai 2015.

  • N. Martel

    Les analyses et articles concernant l’hébergement illégal est toujours du pont de vue des hôteliers, j’aimerais bien que l’on pense qu’il y a d’autre forme d’hébergement qui subissent durement le problème en l’occurrence les Gîte (b&b) du Québec.

    • Aude Lenoir

      Vous avez tout à fait raison, les gîtes sont aussi touchés par cette concurrence. Il y a malheureusement peu d’information disponible à propos de l’impact des locations de logements entre particuliers sur les gîtes.
      Mais vous pouvez partager votre expérience en commentaire ci-dessous, nous serions très heureux d’en prendre connaissance.

      Je me permet aussi de vous suggérer la lecture de notre analyse qui cible votre secteur d’hébergement: « les gîtes: comment mettre en valeur vos atouts » http://dev2.veilletourisme.ca/2013/09/19/les-gites-comment-mettre-en-valeur-vos-atouts/

      Merci

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