L’état de l’offre touristique du Québec: Sommes-nous compétitifs?
Dans cette conférence, monsieur Charles de Gaspé Beaubien, président de EasyBusRental.com et entrepreneur touristique chevronné, a accepté de partager avec nous sa vision de la situation de l’offre touristique québécoise dans l’échiquier international, qui est en constante mutation.
D’entrée de jeu, il nous avise qu’il ne faut pas s’en prendre au messager: «Don’t shoot the messenger». Le discours se veut sans langue de bois et est avant tout une réflexion pour rehausser la compétitivité de notre destination, confrontée à une rude concurrence.
La concurrence est coriace
Le verdict est tombé: le Canada ne figure plus dans la liste des 10 pays les plus visités au monde. D’autres destinations font parler d’elles. C’est le cas, entre autres, de la Turquie, de la Chine et du Mexique. Des villes, encore méconnues il y a quelques années, ont misé sur le tourisme comme axe de développement. En 10 ans, Kuala Lumpur a par exemple investi 4 milliards de dollars dans ses infrastructures touristiques. La métropole a accueilli un peu plus de 8 millions de visiteurs internationaux en 2008.
Le Québec vit quant à lui une décroissance constante de sa clientèle américaine, qui préfère l’Europe, les Caraïbes, le Mexique et l’Asie. De nouveaux produits tels que les croisières tout inclus courtisent cette même clientèle à des prix compétitifs et concurrencent de plus en plus les destinations.
Côté transport, les compagnies aériennes du Golfe et de l’Asie (Cathay Pacific, Etihad Airways, etc.) gagnent en prestige, et les compagnies à bas prix sont spécialement prisées pour les courts séjours.
Entre-temps, la créativité québécoise plaît et s’exporte bien: le Cirque du Soleil présente sept spectacles à Las Vegas et Céline Dion s’y produira pour trois ans à compter de mars 2011. Mais qu’en est-il du produit québécois à destination? Notre offre est-elle suffisamment attrayante pour rivaliser dans un marché plus compétitif que jamais?
Les quatre P de l’offre touristique québécoise
Pour répondre à ces interrogations, monsieur Charles de Gaspé Beaubien a dresé le portrait des quatre P (Place, Produit, Promotion et Prix) de l’offre touristique québécoise:
Place
- Le Québec est au nord, et son marché limitrophe est compétitif. Il est difficile d’attirer la clientèle américaine plus au nord que Boston et sa vie culturelle, que le New Hampshire et son bord de mer ou que le Vermont et ses montagnes. D’autant plus que seulement 21% des Américains détiennent un passeport.
- Notre saison touristique est courte et onéreuse, car les entreprises sont forcées de réaliser leurs profits dans un laps de temps plus court.
- L’accès aux aéroports internationaux est limité et un trajet devient moins attrayant dès que les vols dépassent une correspondance.
- Les tarifs des billets d’avion en direction du Québec ne sont pas compétitifs, si on les compare aux vols à l’intérieur des États-Unis. (À titre d’exemple, un billet au départ de Boston coûte 1078$ pour Québec, 552$ pour Montréal, 259$ pour Los Angeles, 348$ pour Orlando et 253$ pour Las Vegas.)
- Le transport ferroviaire n’est pas suffisamment exploité.
- Le trajet en autocar est abordable mais long, et l’expérience à bord est encore très rudimentaire.
- La signalisation est difficile à interpréter pour les visiteurs internationaux, surtout lorsqu’ils ne comprennent pas le français.
- La méconnaissance de la langue peut représenter une grande barrière, car elle intimide, voire inquiète les Américains.
Prix
- Notre destination est onéreuse, et il est moins coûteux pour un touriste de passer 14 jours en Californie que 12 jours au Québec.
- La notion de taux de change est souvent mal comprise par les Américains.
- Les taxes sur les biens et services sont élevées.
Promotion
- Il y a eu de bonnes initiatives promotionnelles, notamment celles de Bonjour Québec et de Tourisme Montréal.
- Il faut surveiller de près la concurrence des États-Unis, qui prévoient injecter 200 millions de dollars dans le cadre du programme Tourism Promotion Act.
Produit
- Peu d’offres touristiques ont été développées autour du segment «famille». Par exemple, il est difficile de trouver des restaurants familiaux à Montréal, qui compte plus de restaurants branchés, et les activités en soirée manquent au rendez-vous.
Vers un Québec plus compétitif!
Place
- Créer la liaison ferroviaire entre New York, Boston et Montréal pour améliorer l’accessibilité du territoire.
- Développer un transport en autocar haut de gamme reliant Montréal aux grandes villes américaines. L’expérience du déplacement en autocar doit être repensée et renouvelée. À titre d’exemple, elle pourrait inclure de la nourriture à bord, l’accès à Internet et l’aménagement confortable des sièges et des tables.
- Encourager le marché des compagnies aériennes à bas prix.
Prix
- Faciliter le programme de remboursement de taxes pour les grossistes.
- Expliquer aux touristes américains la notion de taux de change.
Produit
- Développer des laissez-passer culturels comme city pass.
- Pour ce qui est de la restauration, s’assurer que les menus sont bilingues et que les repas ne s’éternisent pas. Trois heures à table, c’est trop long pour un Américain!
- Développer des produits de niche tels que le tourisme religieux, les segments «famille» et «étudiants», le tourisme sportif (en misant sur les tournois de hockey), le voyage de groupe et le tourisme gastronomique (en créant des écoles culinaires à Montréal et à Québec).
- En ce qui concerne l’hébergement, l’investissement dans les aménagements et la personnalisation du service restent de mise.
Promotion
- Faire preuve de créativité et d’originalité pour acquérir de la visibilité à moindre coût.
- Tirer profit des nouvelles technologies comme média de promotion.
- Mettre moins l’accent sur l’hiver et la nature lorsqu’on s’adresse aux touristes américains et favoriser plutôt des images de spas et de beaux hôtels.
- Mettre l’accent sur le bilinguisme de la province.
- Mettre moins l’accent sur la promotion des forfaits fins de semaine, qui sont très compétitifs ailleurs, et privilégier les séjours plus longs avec des forfaits combinés entre villes.
Monsieur de Gaspé Beaubien nous rappelle qu’il faut aussi accorder une grande importance à la formation des employés. Les défis sont grands, mais notre conférencier est persuadé que la province a la capacité de les relever et d’augmenter sa compétitivité.
Consulter les présentations des conférenciers lors des ateliers.
Source:
Charles de Gaspé Beaubien. «L’offre touristique québécoise: Est-ce que le Québec est compétitif?», Assises de l’industrie touristique 2010.
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