Au menu aujourd’hui: la santé
Pourquoi l’industrie touristique doit-elle prendre le virage santé? Parce que la clientèle touristique s’en préoccupe et que c’est un positionnement gagnant. De nombreux Québécois sont en mauvaise santé et cela devient préoccupant. Mieux comprendre les tendances en matière d’alimentation affectant votre clientèle ainsi que ses préoccupations vous aidera à adapter l’éventail des mets que vous offrez. Mais peut-être que germera aussi l’idée d’une stratégie de mise en marché concertée…
Plusieurs informations citées dans cette analyse proviennent d’une étude de Transformation alimentaire Québec réalisée en 2009.
État de santé et préoccupations des Québécois
- Près de 27% des Québécois âgés de 15 à 74 ans considèrent leurs journées assez ou extrêmement stressantes (23% pour les Canadiens). Au travail, cette proportion passe à 37% (contre 29% pour les Canadiens).
- La proportion d’adultes obèses (IMC de 30 et plus) est passée de 13% en 1990 à 22% en 2004, soit plus d’un adulte sur cinq; 56% des adultes font de l’embonpoint.
- 62% des Québécois âgés de 20 ans ou plus sont physiquement inactifs.
- Au Québec, 20 000 décès sont causés par le cancer chaque année. Ce type de maladie est en hausse chez les jeunes adultes de 20 à 29 ans et chez les femmes de 39 ans et moins. De plus en plus d’études confirment les liens entre l’alimentation et le cancer.
- Si la proportion de maladies cardiovasculaires a diminué au cours des dernières années (de 25% au cours des dix dernières années), elles demeurent responsables du décès de plus de Canadiens que ne l’est toute autre maladie.
Les Québécois se préoccupent donc de plus en plus de leur santé. Leurs principales inquiétudes sont liées à leur forme physique, au stress, à leur poids et au manque d’énergie (graphique 1).
Graphique 1
Principales préoccupations des Canadiens à l’égard de certains aspects de la santé
Source: Sondage Zins Beauchesne et associés – Ipsos Descarie, 2008
Tendances en matière d’alimentation
Depuis quelques années déjà, l’alimentation santé fait partie des préoccupations des consommateurs et influence l’industrie alimentaire. Parmi un échantillon de personnes ayant décidé de modifier leurs habitudes alimentaires, leurs principales actions sont de boire plus d’eau (77%), manger moins de gras (64%), moins de sucre (59%), plus de fibres (52%), moins de sel (54%) et boire du lait régulièrement (48%). Aussi, les aliments enrichis d’oméga-3, de minéraux ou de vitamines ont la cote; on tend à diminuer la consommation de viande rouge et à opter pour les aliments biologiques.
La qualité des aliments ne doit cependant pas faire ombrage au goût; les choix alimentaires demeurent guidés par la recherche du plaisir. Le consommateur veut découvrir de nouvelles saveurs. La gastronomie, plus présente que jamais, et le mouvement slow food contribuent à faire découvrir et apprécier les produits du terroir, spécialisés ou exotiques.
Les produits du terroir ou régionaux répondent aux besoins d’authenticité et de qualité des consommateurs. De plus, la provenance des aliments compte de plus en plus. Les achats locaux sont populaires, tant pour minimiser l’impact sur l’environnement qu’à cause des scandales alimentaires (listériose, vache folle, etc.), ou encore par solidarité envers l’économie locale. Notons à cet effet l’engagement du gouvernement du Québec, par exemple avec la campagne «Mettez le Québec dans votre assiette». Plusieurs de ces tendances alimentaires sont influencées par la télévision et les restaurateurs de renom.
S’il n’y a pas de montée notable du végétarisme pur, il y a néanmoins une croissance de ce qu’on appelle le flexarisme, c’est-à-dire une diète riche en grains, en fruits et légumes, mais comportant un apport de viande à l’occasion.
L’industrie alimentaire tend également à segmenter ses consommateurs, une tendance que les restaurateurs tardent à suivre. On remarque de plus en plus de produits s’adressant spécifiquement aux femmes enceintes, aux enfants, aux personnes souffrant d’allergies, aux personnes ayant des prédispositions aux maladies cardiovasculaires et autres.
Plus globalement, l’influence des baby-boomers, le manque de temps des consommateurs, leur sensibilité au prix et leur infidélité aux marques, l’ouverture à l’immigration et aux voyages sont quelques-unes des tendances de consommation qui affectent les habitudes alimentaires. Enfin, les médias contribuent à conscientiser les populations.
Un «vrai» menu santé
Pour qu’un menu suive le virage santé, la créativité doit y figurer. Il ne s’agit pas de tout modifier, mais plutôt de mieux faire les choses. Voici quelques idées en vrac:
- Offrez de nouvelles recettes, mais aussi des versions revisitées de recettes traditionnelles. Par exemple, au restaurant Chez Victor à Québec, on peut substituer la boulette de bœuf par une des cinq boulettes végétariennes offertes (céréales, gruau, végé-pâté, tofu et même aux épinards).
- Variez les aliments et ne négligez jamais la fraîcheur!
- Restez simple.
- Soyez vigilant sur la qualité des gras utilisés.
- Diminuez votre consommation de sucre et de sel, des bêtes noires de l’alimentation.
- Des légumes SVP! Dans la restauration moyen de gamme, ils sont souvent sans saveur et dans les restaurants haut de gamme, la quantité est souvent minuscule.
- Sachez plaire aux personnes âgées.
- Attirez les végétariens à temps partiel par l’innovation! Les pâtes primavera ne sont pas un mauvais choix mais il s’agit d’un plat peu original. Proposez d’autres plats renfermant des aliments qui remplacent la viande.
- Choisissez des modes de cuisson affectant le moins possible la valeur nutritive des aliments.
- Prévoyez un menu pour enfants offrant autre chose que des croquettes de poulet.
- Privilégiez les producteurs locaux.
Le succès d’un tel virage passe donc par l’innovation dans les produits utilisés, mais aussi par la constance de la mise en marché. Expliquez vos choix et vos changements à votre clientèle afin qu’elle ne se sente pas déstabilisée.
Une perche tendue pour l’industrie touristique?
La clientèle québécoise est donc sensibilisée, mais un réel virage santé dans l’industrie touristique susciterait également des réactions positives auprès des touristes étrangers. Les problèmes de santé des Américains sont bien connus et les Européens se soucient depuis toujours de la qualité des mets qu’ils consomment.
Les industries hôtelière et de la restauration sont de plus en plus haut de gamme, offrent des produits santé, écologiques, achetés localement, biologiques et exotiques. Mais bien que les restaurants n’offrant pas de mets nutritifs tendent à diminuer, il reste du chemin à parcourir. Qu’arriverait-il si l’ensemble de l’industrie touristique se mobilisait vers une alimentation plus saine et qu’elle en faisait un positionnement?
Sources:
– Blouin, Christine et Rose-Hélène Coulombe. «Menu santé, menu d’avenir», Hôtels, Restaurants & Institutions, volume 11, numéro 4, septembre 2007.
– Deraspe, C., DT.P., MBA, J.-P. Sylvain, DT.P. et S. Savoie, Ing. FCSI – Équipe de gestion des opérations des services alimentaires – Genivar. «Êtes-vous d’attaque pour négocier le virage santé», Hôtels, Restaurants & Institutions, volume 13, numéro 4, 2009.
– Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec. «Étude de la dynamique et des tendances des marchés au sein du secteur agroalimentaire québécois», Mapaq.gouv.qc.ca, 2009.
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Très intéressant… ça aide à réfléchir sur les orientations que nous devons prendre…
Le souci des québécois quant à leur alimentation est un fait de société de plus en plus marqué. Les industries hôtelière et de la restauration devraient en tenir compte pour séduire une nouvelle génération de clients.
PS: croquette de poulet … c’est plus de la nourriture pour animaux. On préferrerait lire « filets de poulet » ou « doigts de poulet »