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Analyses - 26 juillet 2007

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juillet 2007

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Pour mieux comprendre la dynamique qui régit l’achat de crédits de carbone lors de voyages à bilan «carbone neutre»

La compensation volontaire de carbone peut s’appliquer à toutes les activités qui génèrent des gaz à effet de serre (GES). Il s’agit essentiellement de payer des frais supplémentaires pour acheter des crédits de carbone qui seront investis dans des projets de compensation. Pour respecter un bilan «carbone neutre», la quantité de crédits de carbone achetée doit égaler la quantité d’émissions produites.

Avoir un bilan carbone neutre en tourisme est principalement associé au secteur des transports. Toutefois, de plus en plus, les hôtels, les événements et même les compagnies de location de voitures proposent de neutraliser leur empreinte écologique. Même si le principe du «carbone neutre» n’est pas encore appliqué par tous, il est en croissance. Par exemple, en 2005, 0,5 % des passagers de British Airways ont effectué des voyages «carbone neutre» alors que ce nombre est présentement estimé à 1%. Certains rapports révèlent que le marché de la compensation volontaire des émissions de carbone a augmenté de 1000% de 2002 à 2005. Comme ce marché n’est pas réglementé, il faut prendre conscience d’un certain nombre d’enjeux qui en résultent.

Mise en contexte du système de compensation des émissions de carbone

L’achat volontaire de crédits de carbone fonctionne en dehors des mécanismes prévus au Protocole de Kyoto. Pour les particuliers comme pour les entreprises, ce système contribue de manière importante à l’atténuation des changements climatiques; il s’agit aussi d’un bon exemple d’application volontaire du principe pollueur-payeur.

Le Protocole de Kyoto, un cadre obligatoire pour les pays signataires, inclut trois principaux mécanismes:

  • les «échanges» de permis d’émission de carbone,
  • les projets du mécanisme de développement propre (MDP),
  • les projets de mise en œuvre conjointe (MOC).

L’échange de permis d’émission de carbone est une mesure d’allocation qui fixe la limite de pollution que les pays signataires du Protocole de Kyoto peuvent émettre. Ceux qui émettent plus qu’il ne leur est permis doivent acheter des crédits de ceux qui se situent sous leur limite, par le biais du marché du carbone, par exemple le marché européen des permis d’émission. Actuellement, cette mesure touche principalement les compagnies d’électricité et le secteur manufacturier. Elle ne concerne pas encore l’industrie touristique ni les compagnies aériennes, bien que ces dernières subissent d’importantes pressions.

D’autres mesures incluent des projets spécifiques qui permettront de réduire les GES. Ces projets de compensation créent de nouveaux crédits de carbone et comprennent, à titre d’exemple, la production d’énergie renouvelable, le développement de technologies liées à l’efficacité énergétique et le stockage du carbone. Les projets de compensation adoptés en lien avec le Protocole de Kyoto sont gérés par les gouvernements signataires. Tel que mentionné précédemment, il en existe deux types: les projets du «mécanisme de développement propre» permettent aux pays industrialisés d’investir dans des projets localisés dans des pays en développement afin de contribuer au développement durable de ces pays, alors que les projets de «mise en œuvre conjointe» concernent les investissements entre pays développés. En général, l’achat de crédits par les voyageurs pour compenser ou neutraliser leurs activités ne s’inscrit pas dans ce genre de projets, mais il y a des exceptions, dont «Atmosfair», un organisme de compensation.

L’achat volontaire de crédits de carbone n’équivaut pas, en termes absolus, à la réduction des émissions puisque la pollution subsiste. Il est donc essentiel que tout le monde participe aux efforts de réduction. Quelques chercheurs suggèrent que, pour réduire la contribution de GES du secteur de l’aviation de 10%, l’achat volontaire de crédits de carbone devrait se multiplier au moins par 400.

Dix choses à savoir avant de choisir d’avoir un bilan «carbone neutre»

  1. Différents types d’organisations qui vendent des crédits de carbone

Environ 40 organismes vendent des crédits de carbone et l’augmentation de leur nombre entraîne des problèmes de transparence. Parmi ces compagnies, certaines sont à but lucratif, d’autres non, mais elles sont toutes situées dans des pays industrialisés. Elles versent de 25% à 90% de leurs revenus à des projets de compensation. Certaines gardent donc un montant important pour payer leurs frais d’exploitation.

  1. Variations dans le calcul des émissions

Il existe d’énormes différences (jusqu’à 3 fois plus) entre les systèmes de mesure des émissions de carbone utilisés par les organisations qui vendent des crédits de carbone. Il importe de standardiser ces modes de calcul pour augmenter leur crédibilité. Les systèmes doivent êtres à la fois informatifs et précis. En général, plus le nombre de paramètres utilisés est élevé, plus le calcul des émissions de carbone devrait être précis. En ce qui concerne le calcul des émissions provenant des avions, un bon système de mesure prend en compte la distance exacte des déplacements, le forçage radiatif (radiative forcing) à différentes altitudes selon la longueur du vol, le taux d’occupation, l’altitude de vol ainsi que le type d’avion.

  1. Coût des crédits de carbone

Comme le marché volontaire des crédits de carbone évolue à l’extérieur des mécanismes de Kyoto et qu’il n’est ni réglementé ni standardisé, le prix d’une tonne de carbone varie selon les organisations, allant de 3 $ à 43 $ la tonne

  1. Types et qualité des projets soutenus

Parmi les trois principaux types de projets de compensation du carbone, les plus favorables incluent la production d’énergie «sans émission» (éolienne, biomasse, solaire, géothermique, etc.) et le développement de nouvelles technologies (qui utilisent moins d’énergie, telles les voitures hybrides).

Lorsqu’on investit dans ces projets, le principal problème rencontré est lié à l’«additionnalité», un terme qui fait l’objet de discussions dans la comptabilité du carbone. Avant d’acheter des crédits de carbone, il importe de savoir si les projets soutenus contribuent véritablement à la réduction des GES. La question à se poser est la suivante: si je n’avais pas financé ce projet, existerait-il? Si la réponse est oui, ce n’est pas un réel projet de réduction parce que son financement n’est pas venu d’un achat de crédits de carbone.

  1. Gare aux plantations d’arbres

Les voyageurs qui ont l’intention de voyager avec un bilan «carbone neutre» doivent être bien informés sur les crédits de carbone qui financent la plantation d’arbres. Les indices montrent qu’il existe beaucoup trop de problèmes et de controverses à cet effet et c’est pourquoi certaines organisations n’offrent aucun crédit de carbone pour ce genre de projet. Planter des arbres ne résoudra pas seul les problèmes de changements climatiques, car cela ne mène pas à une réduction de la dépendance aux combustibles fossiles (analyse à lire dans un prochain Globe-Veilleur).

  1. Acheter des crédits de carbone de haute qualité

Les compagnies qui vendent des crédits de carbone peuvent oeuvrer ou non à l’intérieur du cadre du Protocole de Kyoto. L’avantage, pour celles qui y adhèrent, est que la réduction des émissions est vérifiée à l’aide d’un cadre réglementé, géré par les gouvernements qui sont partie prenante du Protocole.

  1. Acheter de futurs crédits de carbone

Les voyageurs doivent également savoir que certaines organisations vendent des crédits de carbone pour des projets existants ou des projets futurs. Étant donné qu’un projet peut ne jamais se réaliser ou être moins performant que prévu, il est risqué d’acheter des crédits pour des projets éventuels. Il est toutefois important d’investir dans des projets en démarrage pour donner le coup d’envoi aux nouveaux projets de compensation.

  1. Labels de conformité des projets

Bien qu’elles commencent à se développer, il n’existe actuellement aucune norme pour évaluer la performance des projets de compensation volontaire. Cependant, la Gold Standard Foundation offre un label de qualité – actuellement le plus fiable – aux projets associés au Protocole de Kyoto ainsi qu’à certains autres projets à base volontaire. Des tierces parties évaluent rigoureusement la qualité environnementale des projets. La Gold Standard vise exclusivement les projets d’énergie renouvelable et d’efficacité énergétique.

  1. Emplacement des projets de compensation

Certains projets de compensation sont situés dans des pays en développement et plusieurs d’entre eux ont créé des problèmes d’ordre environnemental et social (tels que la délocalisation des populations, la perte d’accès aux ressources vitales, etc.); c’est pourquoi les voyageurs qui achètent des crédits de carbone doivent s’assurer que les projets répondent aux normes et aux standards de manière à apporter aux pays concernés des bénéfices à long terme.

  1. Organisations de compensation les plus compétentes

Deux récentes études qui ont évalué les organisations de compensation recommandent les suivantes: Atmosfair, Climate Friendly, Myclimate et NativeEnergy.

Et ensuite?

Pour s’assurer que les dépenses supplémentaires des voyageurs et de l’industrie touristique correspondent aux attentes, il est indispensable de répondre aux questions soulevées précédemment.

Le changement climatique est un problème global qui nécessite des solutions globales. Si l’industrie touristique veut garder confiance dans les projets de compensation des émissions de carbone, la méthode de calcul doit être standardisée et les projets doivent être certifiés et accrédités par une organisation compétente.

Entre-temps, il importe de réduire les émissions et de chercher des solutions de rechange à l’utilisation d’énergies fossiles qui contribuent aux changements climatiques. Si nous voulons obtenir un bilan «carbone neutre», nous devons nous assurer que l’argent des crédits soit investi dans des projets de qualité.

1 Le carbone réfère au dioxyde de carbone. Les projets de compensation du carbone incluent parfois la compensation d’autres gaz à effet de serre. Le Protocole de Kyoto reconnaît six responsables du réchauffement: le dioxyde de carbone (gaz carbonique), le méthane, l’oxyde nitreux, les hydrofluorocarbones, les perfluorocarbones et l’hexafluorure de soufre.

Sources:

– Anonymous. The Economist. Carbon Offsets: Ripping Off Would-be greens? The Economist, vol. 382, no 8520, 2007, p. 61.
– Anonymous. The New Internationalist. Special Report on Carbon-related Issues. The New Internationalist, juillet 2006, no 391.
Site Internet d’Atmosfair. [www.atmosfair.de] (dernière consultation le 4 juillet 2007).
Site Internet de Climate Friendly. [www.climatefriendly.com] (dernière consultation le 4 juillet 2007).
– Heughebaert, A. Étude comparative des programmes de compensation volontaire des émissions de C02 par les passagers d’avions. Institut de Gestion de l’environnement et de l’aménagement du territoire, Université Libre de Bruxelles, 2006, 98 p.
– International Civil Aviation Organization. Presentations and Statements. ICAO Colloquium on Aviation Emissions with Exhibition, tenu à Montréal, Canada 14-16 mai 2007.
Site Internet de Gold Standard Foundation. [www.goldstandard.org] (dernière consultation le 11 juin 2007).
– Gössling, S., J. Broderick, P. Upham, J. Ceron, G. Dubois, P. Peeters et W. Strasdas. Voluntary Carbon Offsetting Schemes for Aviation: Efficiency, Credibility and Sustainable Tourism. Journal of Sustainable Tourism, vol. 15, no 3, 2007, p. 223-248.
– Kollmuss, A. et B. Bowell. Voluntary Offsets for Air-travel Carbon Emissions. Evaluations and Recommendations of Voluntary Offset Companies. Tufts Climate Initiative, 2007, 53 p.
-Luzadder, K. Agent Issues: Carbon-offset Programs: a Reality Check. [www.travelweekly.com], 14 juin 2007, 5 p.
Site Internet de Myclimate.[www.myclimate.org] (dernière consultation le 4 juillet 2007.)
Site Internet de NativeEnergy. [www.nativeenergy.com] (dernière consultation le 4 juillet 2007.)
-Tufts Climate Initiative. A Consumer Handout. Flying Green. How to protect the Climate and Travel Responsibility. Tufts Climate Initiative, 2006, 5 p.
Site Internet de United Nations Framework on Climate Change. [http://unfccc.int/2860.php] (dernière consultation le 28 juin 2007).

  • Jean-Luc Burlone

    Bonjour,
    Vous dites que le Gold Standard est de faible qualité, je croyais – au contraire – qu’il était un mécanisme au critères supérieurs au « Clean Development Management » en préférant les projets de compensation d’énergie renouvelable et d’énergie efficace notamment pour assurer le développement durable(Rapport Suzuki)

    Merci
    JL:B

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