Les excursions pour les croisiéristes internationaux: plus qu’un simple tour de ville
Les passagers en provenance de l’international et voyageant sur le fleuve Saint-Laurent ont 15 ans de plus que la moyenne des croisiéristes de l’industrie, sont majoritairement Américains, et ils n’en sont pas à leur première croisière. Comme il s’agit d’une chance exceptionnelle pour une destination de se faire connaître et de se positionner, les excursions qu’elle propose doivent être uniques et complémentaires à l’ensemble de l’offre. Défi de taille certes, mais défi réalisable. Voici un bref aperçu de la demande et de l’offre pour la région du Canada / Nouvelle-Angleterre.
Profil des passagers voyageant sur le fleuve Saint-Laurent
Le nombre de croisiéristes voyageant sur le fleuve Saint-Laurent est en croissance importante depuis plusieurs années. Ainsi, en 2009, 228 757 passagers et membres d’équipage ont navigué sur le fleuve. Les escales voient dans le développement d’excursions une façon de recevoir des capitaux étrangers, mais aussi de faire découvrir leur territoire à de nouveaux touristes. En 2009, le ministère du Tourisme a effectué un sondage auprès des passagers de croisières et des membres d’équipage des neuf escales en mesure d’accueillir des croisières internationales. Au total, 2125 entrevues ont été réalisées. Voici quelques résultats qui en ressortent:
- âge moyen: 63 ans (la moyenne d’âge de l’industrie selon Cruise Line Industry Association (CLIA) est de 48 ans);
- moyenne d’âge qui tend à augmenter (71% étaient âgés de 55 ans et plus en 2006; maintenant, ce taux atteint 82%);
- 61% provenaient des États-Unis et 23% de l’Europe;
- 4,8 croisières effectuées en moyenne par personne, principalement dans les Caraïbes, aux États-Unis (Alaska et Hawaï) et en Europe.
Habitudes d’achat des forfaits excursions
Selon le sondage du ministère du Tourisme, 55% des croisiéristes interrogés ont acheté une excursion en 2009 (en augmentation de 11% par rapport à 2006). Ce taux était plus élevé à Québec et à Saguenay (respectivement 59 % et 61 %). Les passagers ont acquis leur forfait à bord du bateau (49%) et de façon indépendante (47%).
Rappelons qu’il existe une grande différence entre une escale et une arrivée dans un port d’embarquement ou de débarquement. Les passagers qui débutent ou terminent leur croisière ne sont pas nécessairement enclins à participer à une excursion.
Leurs intérêts
Afin de déterminer les intérêts des passagers en visite sur le Saint-Laurent, nous avons établi une corrélation entre leur provenance géographique et les activités qu’ils réalisent au quotidien. Ainsi, en 2009, la région de provenance des Américains en croisière sur le Saint-Laurent était, par ordre d’importance, l’ouest des États-Unis, le sud et le nord-est (graphique 1).
Les grandes zones métropolitaines correspondant à ces régions sont celles de New York, Boston, Los Angeles et de Miami/Fort Lauderdale. Nous les avons utilisées à des fins comparatives afin de déterminer les activités les plus populaires pour l’ensemble de la population. Les variables utilisées ci-dessous sont calculées à partir d’un indice 100 qui reflète la moyenne nationale des États-Unis. Plus l’indice surpasse 100, plus la tendance à pratiquer l’activité est élevée.
Le graphique 2 présente les activités populaires pertinentes pour la destination québécoise. Les résidents de ces régions métropolitaines démontrent une plus grande propension envers la fine cuisine, les activités culturelles et artistiques, le vin, la santé et l’alimentation naturelle que la moyenne de la population américaine. On peut ainsi présumer qu’une excursion mettant par exemple à l’honneur les produits du terroir ou les festivals et événements pourrait susciter l’intérêt des voyageurs. Fait particulier, le bas taux de pratique d’activités liées à la nature peut être expliqué par le fait que les gens résident en milieu urbain, sans être directement associé à un manque d’intérêt de leur part.
Ces voyageurs indépendants
De nombreux passagers préfèrent visiter les escales proposées à leur rythme, une situation observée dans de nombreuses régions du monde. La ville du Havre en France a décidé d’offrir des navettes gratuites pendant les escales afin de faciliter les déplacements en ville. En 2006, avant l’instauration du système de navette, les passagers visitaient la ville dans une proportion de 14%. Depuis son instauration en 2007, la proportion est passée à 36% et à 47% en 2008.
Les voyageurs qui choisissent de visiter une destination par leurs propres moyens peuvent créer quelques casse-têtes logistiques pour les intervenants et ils dépensent généralement moins. Des circuits d’autobus où l’on peut monter ou descendre à volonté peuvent constituer une façon de retenir ces passagers qui désirent avoir une plus grande liberté dans leurs déplacements.
L’exemple d’Holland America Line
Les excursions offertes par Holland America Line au Canada et en Nouvelle-Angleterre sont très diversifiées. Chacune des escales possède évidemment son propre tour de ville plus classique, mais tente aussi d’offrir une exclusivité. Bar Harbor offre la dégustation d’un repas de homard sur la grève, Halifax propose une journée d’initiation à la vie d’un soldat à l’époque de la reine Victoria, Québec a mis sur pied une visite guidée sur la thématique des fantômes ainsi qu’une activité à la cabane à sucre, alors que Saint John offre un tour en jet boat dans les Reversing Falls.
Pour les régions de l’Europe du Nord et de la Baltique, les excursions ont une dimension historique plus importante (visite de châteaux, musées, camps de concentration, sites de l’Unesco). Plusieurs d’entre elles proposent également une visite guidée privée de la région en voiture ou la possibilité de faire une croisière fluviale. De plus, les escales européennes privilégient la découverte de leur gastronomie locale et le tourisme d’apprentissage. Quant aux tarifs demandés, ils sont comparables, que l’on soit en Europe ou en Amérique du Nord.
Les tendances
Certaines tendances semblent se dessiner dans l’univers des excursions pour les passagers de croisières. Notons d’abord un intérêt des croisiéristes pour les produits culturels et historiques. L’apparition des mid-cruises vient également diversifier l’offre plus classique. Ces dernières consistent en des excursions comprenant des nuitées permettant de visiter une destination plus en profondeur. Le développement durable influence également la planification de certains itinéraires. La compagnie italienne Costa Cruises a d’ailleurs intégré 240 excursions écologiques dans ses forfaits.
Le secret du développement des excursions pour une destination est de se différencier et de mettre en valeur ses atouts. Il ne sert à rien de tenter de recréer de toutes pièces un attrait. L’authenticité de l’expérience, la qualité du produit offert et son caractère unique doivent être à la base du développement. De plus, l’analyse des excursions offertes, pour le développement des expériences, ne doit pas se limiter aux concurrents géographiques, mais doit aussi s’étendre à l’offre globale présentée par les compagnies de croisières. Ainsi, Princess Cruise Lines ne sera pas nécessairement intéressée par le même produit que Costa Cruises. Finalement, cette prise de conscience doit aussi se refléter sur l’ensemble des escales du Saint-Laurent, voire même de la destination Canada – Nouvelle-Angleterre, qui doivent offrir des produits différents mais complémentaires.
Analyse rédigée dans le cadre de la veille thématique réalisée pour le ministère du Tourisme du Québec.
Sources:
-Statistiques d’achalandage 2006-2010, compilées par le ministère du Tourisme.
–Azamara Now Azamara Club Cruises – Updated Name, New Logo and Tagline, Cruise Industry News.com, consulté le 8 décembre 2009.
–Costa Cruises Offers 240 Eco-Excursions on Sailing Around the World, World Leading cruise Lines.com, consulté le 2 novembre 2009.
–Cruise Lines International Association
-The Lifestyle Market Analyst, SRDS Media Solutions, 2007.
-Sondage réalisé auprès des croisiéristes et membres d’équipage au cours de la saison 2009, Association des croisières du Saint-Laurent, préparé par Doxa Focus, 2009.
-Sondage réalisé auprès des croisiéristes et membres d’équipage au cours de la saison 2009, ministère du Tourisme, 2009.
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Ce sujet touche la suggestion que j’ai soumis la semaine dernière pour une analyse future plus poussée … je crois que cette industrie a beaucoup de potentiel pour le QC, et qu’il faut travailler à soutenir chaque destination à développer une offre de qualité supérieure qui la distingue. À titre de croisiériste (Holland; Celebrity) depuis 8 ans, je partage votre diagnostic; je crois qu’il faut aller beaucoup plus loin avec les intervenants, en particulier les jeunes entrepreneurs qui ont misé sur les forces de leur milieu et innové… même le traditionnel (e.g. cabane à sucre) doit être présenté de façon innovatrice et ‘genuine’… les croisiéristes aiment un certain confort, mais n’aiment pas les excursions ‘artificielles’ … pour ceux et celles qui aiment visiter en indépendants, ils-elles ont besoin d’information sur la destination pour préparer leur court séjour … ils doivent savoir qu’il y a une navette disponible… c’est beaucoup mieux que la carte trop simpliste offerte par le bateau; c’est mieux que tous les chauffeurs de taxis qui nous attendent au quai et nous harcèlent plus ou moins pour offrir leurs services…